30 000 euros pour voir fondre l'Arctique

La France entre dans la course au tourisme de l’extrême vers les pôles. Le groupe Ponant, propriété de la famille Pinault, va lancer dès le 24 juillet son navire brise-glace flambant neuf, le « Commandant Charcot », pour son premier voyage en direction du pôle Nord. Il sera suivi par deux autres au cours de l’été, avec à chaque fois 270 touristes à bord et 190 membres d’équipage. C’est plus de deux fois par voyage le nombre de passagers que se proposait jusqu’ici d’emmener le seul navire, russe, à s’y rendre. Un raz-de-marée.

Le coût d’une telle équipée aurait pourtant de quoi en rebuter plus d’un. Entre 26 000 et 70 000 euros les seize jours de croisière, en fonction de la taille de la cabine ou de la suite (jusqu’à 115 m²) choisie. Mais aussi exorbitant qu’il puisse paraître pour une très large majorité de Français, il ne constitue apparemment pas un obstacle pour tous : la première de ces sorties affiche d’ores et déjà complet. Aller fouler du pied l’un des 3 % d’endroits encore écologiquement intacts de la planète — selon une étude parue dans Frontiers in forests and global change le 15 avril — n’a pas de prix.

Voyage dans un territoire en voie de disparition

Encore moins quand le voyage se fait « à l’invitation de l’ours polaire », comme le suggère Nicolas Dubreuil, directeur des expéditions polaires chez Ponant, lors d’une conférence en ligne organisée en novembre pour présenter la nouvelle attraction de la compagnie. Près de trois mille personnes étaient connectées ce jour-là. Les questions fusaient sur la sécurité, les températures, les réservations, le confort… Pas une seule sur le coût écologique d’une telle excursion alors que la menace pesant sur ces territoires est bien réelle : avant 2050, la banquise disparaîtra presque totalement en été, avec de lourdes conséquences pour les populations locales et les espèces qui y vivent. Pourtant, l’aventurier en chef l’assure, « l’objectif est d’arriver à faire de vous les ambassadeurs de ces régions » dans le but de mieux les protéger.

Une gageure quand on étudie les comportements pré et post voyage de ces touristes de l’extrême, comme l’ont fait Jennifer et Warwick Frost, chercheurs à l’université de La Trobe, en Australie : « Il y a un manque de réflexion sur leur propre impact écologique chez ce genre de voyageurs. L’idée que le voyage vers ces régions puisse affecter l’environnement qui les y attire est parfois totalement ignorée. » Ils notent…

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Auteur: Clément Nicolas Reporterre