Besançon (Doubs), reportage
« Il suffit d’une gentiane de Koch et vous y passez : c’est la peine de mort ! » Effet de manche à l’appui, Charles Lagier ne craint pas l’exagération. Devant le tribunal correctionnel de Besançon, l’avocat assurait la défense du Syndicat mixte du Mont d’Or. La structure qui exploite le domaine skiable de Métabief, dans le Doubs, était prévenue de deux infractions : la destruction de l’habitat de trois espèces végétales protégées — dont la fameuse gentiane de Koch — et le dépôt de remblais sur une zone visée par un arrêté préfectoral de protection de biotope.
Les faits, des travaux d’aménagement d’une retenue collinaire destinée à alimenter des canons à neige, remontent à 2013. « Ce qui a été fait a sauvé la station, son avenir, ses emplois », a plaidé Me Lagier, en relativisant les atteintes à la biodiversité.
Loin de la peine capitale brandie par l’avocat, la représentante du ministère public a requis une amende de 5 000 €, la restauration du site dans les deux ans et la diffusion de la décision du tribunal par voie de presse et d’affichage. Claire Keller accuse le Syndicat mixte d’avoir « fait primer l’intérêt financier sur l’intérêt écologique ».
L’affaire, dont le jugement sera mis en délibéré, était examinée ce 1ᵉʳ février lors d’une audience correctionnelle d’une demi-journée entièrement dédiée aux infractions écologiques. Une initiative du tribunal de Besançon, née de la mise en place du pôle régional environnemental (PRE).
Cette juridiction spécialisée a été créée dans chaque ressort de cour d’appel par la loi du 24 décembre 2020 afin de remédier à l’inefficacité judiciaire dénoncée de longue date par les défenseurs de l’environnement. La justice française s’avérant trop souvent impuissante à sévir contre les pollutions de l’eau, de l’air ou des sols, le non-respect des réglementations ou les destructions d’espèces et d’habitats naturels.
Radars écologiques
« Le pôle régional environnemental (PRE) nous permet de nous préoccuper de ces problématiques qui étaient traitées accessoirement, après les violences et les trafics de stupéfiants, admet Étienne Manteaux, procureur de la République de Besançon. Quand ils parvenaient à l’audience, les dossiers étaient sabotés car les mis en cause, notamment des chefs d’entreprise et des élus locaux, pouvaient financer des défenses efficaces face à des magistrats peu au fait de ces questions. » But affiché par l’institution : sanctionner de manière cohérente et transparente, acculturer les juges au droit de l’environnement, nourrir la jurisprudence. Et mettre fin à une trop fréquente…
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Auteur: Reporterre