À bout de flux

Dans À Bout de Flux, à paraître le 23 septembre aux Éditions Divergences, l’historienne de l’architecture Fanny Lopez poursuit un travail qui s’attache à décortiquer les dimensions politiques et spatiales des infrastructures énergétiques. L’auteur y déploie une double histoire du numérique et des réseaux de production, d’acheminement et de transmission électrique : un éventail de prises pratiques par lesquelles comprendre le fonctionnement de cette « mégamachine ».

A l’heure où les appareils gouvernementaux présentent la sobriété individuelle comme réponse à la crise de l’énergie, et où Ursula Von Der Leyen nous apprend comment nous laver les mains sans gaspiller de l’eau en sifflant l’hymne européen, Fanny Lopez revient avec clarté et finesse sur les aspects matériels de ces infrastructures, et met en relief différentes propositions pour les mettre en déroute : leur opposer d’autres formes de réseaux, d’autres rapports à la technique. Comme nous la recevrons la semaine prochaine dans lundisoir, nous vous proposons, en guise de prémices, ces bonnes feuilles.

Doublé en extérieur d’une sécurité infrarouge, le mur d’enceinte de six mètres est auréolé de barbelés et d’une ribambelle de caméras de très haute précision. Au sol, sous le bitume, tout autour du bâtiment, une technologie israélienne de fibre optique détecte les mouvements. À l’intérieur, la circulation est sans cesse interrompue par des sas, caméras thermiques, vitres blindées, double, triple codages, surveillant·es de couloirs. 25000 points de sûreté, presque autant que dans une centrale nucléaire. Les centres de données (ou data center) sont aujourd’hui les infrastructures les mieux surveillées et les plus efficientes de France, avec des moyens capitalistiques inégalés pour des objets d’une incomparable technicité. Un métier d’expert, une réglementation ICPE parmi les plus rigoureuses d’Europe. Des murs antibruit garantissant 45 décibels en façade, des parois coupe-feu, des systèmes de ventilation, de refroidissement et de maîtrise de l’humidité pour maximiser le confort et donc la puissance des microprocesseurs très sensibles aux variations hygrométriques, des revêtements absorbant la poussière. Rien n’est trop cher pour protéger et optimiser le lieu d’échange de la valeur. Car ce n’est ni au moment de sa création, ni durant son traitement, ni pendant son stockage que la donnée prend de la valeur. Ce qui crée de la…

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Auteur: lundimatin