À l'assaut du ciel

Aussi loin qu’on regarde, on serait tenté de dire avec Alphonse Karr que plus ça change, plus c’est la même chose. Cela se peut-il que les gens et les jours soient restés inchangés depuis toujours ?

Pour le bonheur du chasseur, on eut la gentillesse de créer le gibier. Aujourd’hui on laisse le gibier libre de courir, mais on s’applique à ce qu’il demeure à perpétuité désarmé. On n’est jamais assez précautionneux.

La charité est le plus fin plaisir d’un cœur généreux. Aussi s’est-on avisé de garder les miséreux en l’état. Aujourd’hui on sublime sa jouissance en lui allouant plus de richesses : qu’il se délecte à répandre quelques faveurs sur la grossissante foule des gueux !

L’éclat du maître se mesure à l’aune de son pouvoir sur les faibles. Il lui fallait donc quelques esclaves et il les a eus. Aujourd’hui on magnifie sa grandeur en enchaînant la multitude à un piteux gagne-pain incertain. La peur du lendemain est plus persuasive que la trique.

Pour se hisser près de Dieu, il fallait bien rabaisser l’humanité. Ainsi le Blanc a-t-il créé le Noir, le civilisé le sauvage, le vrai croyant l’infidèle et le dévot le pécheur. Il y a dix siècles on voulut imposer la bonne parole aux voisins mécréants aux cris de “Dieu le veut”. Aujourd’hui on préfère enrober de devises profanes les bombes et les obus qui écraseront les insoumis. Le dogme régnera partout unanimement, quitte à faire de l’univers un désert de cendres.

De nos jours comme hier, comme jadis, quand on veut tuer son chien on hurle qu’il a la rage. L’écho grossissant des hurlements qui déjà remplissent l’air nous avertit de l’étendue des carnages à venir.

Suffit ! Qu’il ne tarde plus le moment où s’accomplira l’injonction du poète :

Race de Caïn, au ciel monteEt sur la terre jette Dieu !

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Auteur: lundimatin