À pas de tortue, la cistude d'Europe reprend ses droits dans nos mares

Manciet (Gers), reportage

Silencieux, courbé en deux, Jean-Michel se faufile discrètement entre les joncs. De loin, Simon lui fait de grands gestes pour le guider. D’une main experte, il plonge son épuisette dans le bassin… et en ressort une tortue. Points jaunes sur tout le corps, carapace presque noire : c’est bien une cistude d’Europe. « Il faut être très discret, car la tortue entend et voit très bien. Au moindre bruit, elle disparaît dans l’eau. » Jean-Michel Catil est naturaliste chez Nature en Occitanie. Chaque semaine, il sillonne les routes du Gers à la recherche de la cistude d’Europe.

En ce lendemain d’orage, les prairies sont gonflées d’eau. Il n’est que neuf heures, le ciel est couvert mais il fait déjà chaud. Alors qu’autour de nous les champs de maïs coupent le paysage, nous nous arrêtons dans une prairie où centaurées, potentilles, trèfles, pissenlits et graminées poussent en désordre. Les grillons des marais stridulent. « C’est un beau terrain de jeu pour les animaux. Regardez ! Cette sauterelle, par exemple, n’existe que dans les Landes. Elle est bruyante, mais difficile à repérer. » De l’herbe jusqu’aux genoux, bottes aux pieds et filet à papillons en main, Jean-Michel se démène pour attraper des insectes. Ici, une libellule cordulégastre annelé. Là, une piéride du chou. Plus loin, sa cousine, la piéride du navet. « Amenez un naturaliste dans une prairie, il peut passer des heures à sauter pour observer les papillons », s’amuse Simon Rizzetto, ingénieur forestier spécialiste des zones humides, qui a rejoint l’association quelques semaines auparavant.

Il faut être discret pour surprendre cette tortue aux sens aiguisés. © Maxime Reynié/Reporterre

Il y a seulement un an, cette prairie n’existait pas. C’était un champ de maïs. Yann Ducournau, le propriétaire a décidé de ressemer pour redévelopper la biodiversité et créer une zone de ponte pour les tortues. En dessous de la prairie, un cours d’eau, lieu de passage des loutres. Et en face, un champ, totalement labouré. « Là, il n’y a plus rien. C’est un billard pour la biodiversité », s’émeut Jean-Michel. Nous progressons encore un peu, traversons un fossé boueux. C’est à proximité de la prairie, sur la station d’épuration de la commune de Manciet, que se trouve la population de cistudes. « Nous allons bientôt proposer au propriétaire de creuser une ou deux mares dans la prairie, pour proposer aux tortues un habitat plus naturel. »

Jumelles en mains,…

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Auteur: Reporterre