À Pau, on aurait anticipé et évacué, à Mayotte, on compte les morts

L’île de Mayotte, ce coin du monde revendiqué par la France en plein océan Indien, continue de vivre une tragédie d’une ampleur effroyable. Le cyclone Chido a balayé les terres, laissant derrière lui un paysage apocalyptique. Des quartiers entiers dévastés, des maisons éventrées, des corps encore introuvables sous les décombres et d’autres enterrés au plus vite, sans la moindre aide, des enfants errant dans une boue infestée de déchets. Au-delà des vents à 220 km/h et des vagues destructrices, un autre fléau frappe Mayotte : l’indifférence. Une indifférence enracinée dans un passé colonial jamais digéré et dans une forme insidieuse de racisme environnemental.

Mayotte n’a jamais été seulement une île. Elle est le vestige d’une histoire inavouée, celle d’une France coloniale qui s’est enrichie en appauvrissant les autres. En 1841, la France « achète » Mayotte pour une somme dérisoire, comme on achète un objet, en se convaincant que c’est un territoire sans âme, sans mémoire. Depuis, elle l’a laissée exister en périphérie de sa puissance, en périphérie de son propre développement, jamais pleinement intégrée, toujours marginalisée. Département français depuis 2011, Mayotte est l’exemple parfait d’un colonialisme qui refuse de s’assumer. Un colonialisme qui ne dit pas son nom, mais qui se traduit par des infrastructures défaillantes, un sous-développement chronique et une dépendance totale entretenue à la métropole.

Dans cette île où plus de 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, les quartiers précaires s’accumulent sur des terrains instables, à flanc de colline, souvent en bordure de lagons pollués. Ce sont ces bidonvilles qui ont été les premières victimes de Chido. L’immense écrivaine guadeloupéenne Maryse Condé, dans son œuvre, évoque souvent la violence des dépossédés, à qui on ne laisse rien sauf les miettes d’un monde qu’on leur refuse. À…

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Auteur: Eros Sana