Althusser, les sans-papiers, le communisme. Entretien avec Emmanuel Terray

Dans cet entretien inédit en français, Emmanuel Terray revient sur trois moments essentiels de son parcours : son rapport à l’entreprise de renouveau du marxisme menée par Louis Althusser et ses élèves au cours des années 1960 ; son implication dans la lutte des travailleur.ses migrant.es et des sans-papiers ; son engagement intellectuel et militant pour un communisme hétérodoxe.

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Comment décririez-vous l’influence d’Althusser au début des années 1960 sur un jeune anthropologue comme vous ?

Nous partagions alors dans un cadre marxiste, mais le marxisme de l’époque ne nous satisfaisait pas. D’un côté, il y avait ce que l’on pourrait définir comme le marxisme officiel, le marxisme tel qu’il était enseigné ou diffusé par les philosophes proches du Parti communiste français, comme Roger Garaudy et d’autres. C’était un marxisme extrêmement dogmatique, extrêmement mécaniste, qui ne nous plaisait pas parce qu’il n’avait rien d’autre à offrir que la théorie du reflet, de la détermination parl’économie, etc.

D’autre part, de nombreux interprètes, souvent chrétiens, mais pas seulement, accordaient une position privilégiée aux Manuscrits de 1844 de Marx et les utilisaient pour en tirer une philosophie de l’existence et une philosophie du sujet, en se concentrant sur la notion d’aliénation. C’était une interprétation beaucoup plus intelligente d’une certaine manière, mais, en même temps, elle présentait l’inconvénient fondamental d’effacer la rupture entre le marxisme   et la philosophie bourgeoise et de rattacher en quelque sorte le marxisme au grand courant de la philosophie de l’existence. Bien sûr, les chrétiens n’étaient pas les seuls à dire cela, Jean Hyppolite allait également dans ce sens. Hyppolite avait écrit des études sur Marx et Hegel qui s’inspiraient desManuscrits de 1844 et réduisait les différences entre ces deux…

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Auteur: redaction