Anatomie d'une campagne médiatique contre la gauche (2/3)

À intervalles réguliers, le rouleau compresseur compresse : haro sur la marche contre l’islamophobie en 2019, chasse aux sorcières « islamogauchistes » en 2020, sus à l’université « gangrénée par l’islamogauchisme » en 2021, cabales contre le « wokisme » depuis. Le tout entrecoupé d’emballements contre le voile et les femmes musulmanes qui le portent. C’est à ces campagnes médiatico-politiques que viennent s’ajouter la stigmatisation de La France insoumise en général, celle de la Nupes par capillarité, et l’acharnement médiatique contre le journaliste et candidat Taha Bouhafs en particulier – la séquence médiatique étudiée ici, concernant ce dernier, est antérieure aux accusations portées contre lui par plusieurs femmes de harcèlement et agressions sexuels, viol pour l’une d’entre elles, accusations l’ayant conduit à retirer sa candidature dans la circonscription de Vénissieux (Rhône) aux élections législatives (nous y reviendrons).

Entraînés par la dérive réactionnaire d’une grande partie du champ politique, biberonnés aux éléments de langage et aux obsessions du Printemps républicain, les grands médias charrient ainsi de jour en jour un récit fossilisé. Fossilisé, parce que « l’islamogauchisme » est un « slogan politique » qui « ne correspond à aucune réalité scientifique », comme le rappelait le CNRS dans une (rare) prise de position publique en février 2021. Un stigmate qui fait pourtant désormais partie du « sens commun » journalistique, aussi flou qu’évocateur, en tout cas suffisamment pour disqualifier instantanément sa cible. Un lexique qui – à l’instar de « communautarisme » avant lui – ne s’interroge plus, noyé dans un débat sur la « laïcité » lui-même mutilé et dévoyé à outrance. Un référent autonome, mobilisé sur des plateaux où le pluralisme est piétiné, et par des commentateurs officiant en cercle fermé, tant ces derniers ne sont jamais confrontés au débat scientifique – les chercheurs étant, à de très maigres exceptions près, relégués aux marges de l’espace médiatique.

Ainsi peut se déployer le « ronron » ordinaire. Par exemple, cette déclaration d’amour parue dans Marianne (3/02) bien avant le premier tour de l’élection présidentielle et signée Éric Naulleau, fidèle compagnon de route d’Éric Zemmour : Jean-Luc Mélenchon « ne s’adresse plus qu’à des clientèles séparées (voire séparatistes) », envoie des « clins d’œil les plus appuyés […] en direction…

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Auteur: Pauline Perrenot Acrimed