Après avoir combattu Daech, le Rojava a besoin de notre solidarité

La première chose qui me saute aux yeux à mon retour dans la Drôme, c’est le vert. Du pomme, de l’émeraude et du bruyère. L’herbe tendre et humide des champs et les feuilles encore jeunes des arbres, la brise légère qui apporte un peu de fraîcheur en ces premiers jours de grandes chaleurs. Puis la rivière, le long de la vallée, alimentée par les pluies de printemps et un hiver neigeux, et le bruissement, au fond de mon jardin, du canal d’amenée. Enfin dans la maison, l’eau, fidèle au poste, qui en un tour de poignet se met à ruisseler du tuyau jusqu’au robinet.

Avoir éprouvé, entre le Tigre et l’Euphrate, les longs horizons jaune paille des champs de blé grillés, la poussière sèche et insidieuse du désert qui vient vous asphyxier la peau et tout gripper, les tempêtes de sable et la torpeur assommante d’un ciel bas, sans un îlot d’ombre, à plus de quarante degrés ; avoir arpenté les ruines laissées intactes, pour la mémoire, à Kobane et les ravages de douleur encore partout présents à Raqqa, avoir longé les allées des cimetières de martyrs et vu la combustion spontanée d’une décharge à ciel ouvert, permet d’apprécier à sa juste valeur le confort inouï dont nous jouissons ici. En éprouver l’indécence du bout des doigts, écartelée entre le soulagement et la part morale que l’on doit à celles et ceux qui sont restés là-bas.

Après la guerre contre Daech, une autonomie à construire

Je rentre de deux semaines de mission en Syrie du nord-est, avec un passage par le Kurdistan irakien. Des journées à parcourir le Rojava, Raqqa et Kobane avec une délégation de huit personnes, membres de coopératives, municipalités et ONG réunies autour du projet Jasmines, que nous avons initié depuis plusieurs mois avec la Fondation Danielle Mitterrand pour établir des ponts entre ce territoire auto-administré et des acteurs français. Les projets repérés avec nos partenaires locaux sont variés, les besoins indénombrables entre la poursuite d’un idéal en actes, démocratique et féministe, et la reconstruction après la guerre contre Daech qui a laissé nombre de zones en ruines, la gestion des déchets, les projets d’équipements culturels, cinéma et bibliothèques, les coopératives de femmes, les projets agricoles, de recyclage, les problèmes de canalisations et d’assainissement de l’eau…

Il me faudrait plus de temps et d’énergie, plus de recul aussi que ceux dont je dispose aujourd’hui pour en rendre compte pleinement. Ce que nous y avons vu, les personnes que nous…

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Auteur: Corinne Morel Darleux Reporterre