Après Conflans : gare aux mots de la démocratie

En tant qu’être humain, citoyen, professeur d’histoire dans l’enseignement supérieur, ancien professeur d’histoire-géographie dans l’enseignement secondaire en banlieue parisienne, j’ai été sidéré, horrifié et meurtri par la décapitation de Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine. En tant que fonctionnaire ayant fait du service public le sens de ma vie professionnelle et l’un des sens de ma vie tout court, mais aussi en tant que chercheur sur la modernisation politique du catholicisme au XXe siècle, je suis un ardent défenseur de la laïcité qui, d’une part, permet le libre exercice de toutes les religions sans en favoriser aucune et, d’autre part, fonde la stricte séparation des plans temporel et spirituel – autrement dit l’autonomie du politique dans son ordre et l’exercice de la souveraineté populaire contre toute tentative d’une légitimité qui émanerait du sacré. En tant qu’homme de gauche rationaliste et athée, j’observe avec effroi et sans aucune complaisance la radicalisation politique à des degrés divers de groupes religieux – au sein de l’islam comme dans le christianisme ou dans le judaïsme – qui entendent soumettre l’ordre social aux règles liberticides de quelque transcendance, la vie de tous les individus à quelques vérités révélées. Comme beaucoup, je m’interroge profondément sur la nature des réponses qui doivent être apportées aux dérives politiques du religieux, a fortiori lorsque celles-ci conduisent à l’abjection terroriste de Conflans. Mais j’ai en tout cas la certitude que celles-ci doivent être formulées – en France comme ailleurs – dans le plus strict cadre légal et démocratique afin, précisément, de légitimer notre ancrage collectif dans un modèle de gouvernance qui, à défaut d’être parfait, n’en est pas moins antagonique en tous points au fantasme théocratique. Ces réponses politiques, on est en droit de l’espérer, devraient…

Auteur: gillesmartinet
La suite est à lire sur: universiteouverte.org