Après Mahsa Amini, une colère flamboyante

La scène est noyée dans un clair-obscur plein de gravité, pourtant aspiré vers le haut par un arc d’étroites fenêtres lumineuses, couleur bleu sans nuage. Le violoncelle de Sonia Wieder-Atherton gémit, profond et résolu. Soutenu par le piano de Shani Diluka, l’archet glisse avec effort comme les eaux d’un fleuve volontaire contre l’adversité des rives. Il se dilue dans la mélancolie pour libérer une brève élévation en persan, lourde de tendresse douloureuse, suspendue au vibrato d’Anousha Nazari. « Je caresse tes cheveux… »

« Muhayat » (Tes cheveux) est l’acte IV de Mèches de feu, une série de cinq clips vidéo. Le compositeur classique iranien (1) a ramassé en quelques phrases des poèmes de ses compatriotes Ramtin Dari et Garous Abdolmalekian, dont la comédienne Julie Gayet déploie la version française dans un solo sobre. La salle de cinéma où est projetée l’avant-première retient son souffle. L’œuvre sera diffusée sur les réseaux sociaux à partir du 16 septembre, date anniversaire de la mort de Mahsa Jina Amini. La jeune étudiante d’origine kurde est décédée à la suite de son interpellation violente par la police des mœurs, dans une rue de Téhéran, pour « port de vêtements inappropriés ». Elle aurait laissé voir des mèches de cheveux, contrevenant à l’obligation imposée aux femmes par les ayatollahs, depuis la Révolution islamique de 1979, de voiler leur tête en public. Dans les heures qui ont suivi, et pendant des mois, la colère des Iraniennes a enflammé les rues du pays.

« Des années durant, comme un fleuve ralenti par d’étroites courbes, vous avanciez silencieusement, doutant des plaines sans élan, déclame Julie Gayet. Et aujourd’hui, ce fleuve longtemps sous un épais voile ressurgit plus fort qu’une rivière gorgée de remous. Il renaît, de son lit, d’abondants cheveux qui se traînent dans les rues. Les mots,…

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Auteur: Patrick Piro