Au-delà du mouvement social, quel avenir pour les syndicats ?

La mobilisation organisée par les syndicats est sociale, elle ne doit rien aux partis politiques, c’est ce qu’a indiqué vertement le 19 février 2023 Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT, au leader de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, et à ceux qui tentent de « s’approprier ce mouvement social […] et de se substituer aux organisations syndicales ou essaient de se mettre en avant (par rapport à elles et à) ceux qui défilent dans la rue ».

A l’Assemblée nationale, le spectacle offert par les députés a été jugé pitoyable par nombre d’observateurs, ce qui ne doit pas conduire à négliger l’essentiel : la réforme est portée en réalité au niveau institutionnel par un axe Emmanuel Macron/Eric Ciotti, par l’association de la majorité et du parti Les Républicains. Ce parti devient paradoxalement la figure d’une opposition supposée constructive, comme si elle incarnait la contestation, alors qu’elle n’a rien à voir avec elle.

La mobilisation sociale contre le projet du gouvernement ne se transforme pas, au Parlement, en négociation ou recherche de compromis puisque ceux qui négocient n’ont aucun lien ni avec le syndicalisme, ni avec la protestation populaire. Cette dernière est organisée, résolue mais non violente. Elle est structurée par un ensemble d’organisations syndicales qui font preuve d’unité pour la première fois depuis 2010.



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Il y a là un signe de vitalité démocratique et politique, dont la fragilité ne doit pas être sous-estimée : que restera-t-il de l’unité syndicale une fois la réforme votée, ou au contraire abandonnée ? Et surtout, le syndicalisme peut-il constituer durablement un acteur décisif sans ancrage renforcé sur le terrain, sans un enracinement plus marqué là où il côtoie et représente les travailleurs au plus près ? C’est d’abord là où l’on travaille qu’il est légalement et pas seulement légitimement actif, reconnu par le droit, où il a des élus, où sa voix est officiellement reconnue.

De la rue aux entreprises

L’articulation ici aussi n’est pas évidente. Même si dans les deux cas la mobilisation est organisée par les mêmes acteurs, les syndicats, il n’y a pas une relation automatique et forte entre celle de la « rue », et celle qui peut s’opérer sur les lieux de travail ;…

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Auteur: Michel Wieviorka, Sociologue, Auteurs historiques The Conversation France