La Nuit de cristal du 9 novembre 1938, Herbert Traube, juif autrichien, la raconte à hauteur d’enfant et avec une précision implacable. À 99 ans, l’ancien résistant, légionnaire et soldat de la Libération, survivant de la Shoah, a l’élégance du verbe et de l’humour. Au Mémorial de la Shoah, à l’occasion du 85e anniversaire de la nuit des pogroms, il raconte.
Chevelure et moustache d’une blancheur impeccable, il répond aux questions et s’en échappe souvent. Au premier rang, des lycéens, des parlementaires, ainsi que les ministres de la culture française et allemande, réunies en ce lieu pour cette commémoration si particulière, un mois après l’attaque terroriste du Hamas en Israël.
C’est à Vienne, où il est né le 15 juillet 1924, que la vie de Herbert Traube bascule à l’automne 1938. L’antisémitisme, il en connaît déjà l’existence, précise-t-il, depuis qu’il a entendu proférer cette insulte, « sale juif », lors d’une promenade dans la rue en compagnie de son père, à l’âge de 8 ans.
Mais au lendemain de l’Anschluss, « on est venu nous chercher pour nettoyer dans la rue des inscriptions en faveur de l’indépendance de l’Autriche ». Il se souvient des mots de son père, alors qu’ils frottent le mur tous deux sans relâche : « Tu bouges pas, tu dis rien, tu ne fais pas l’imbécile ». Des brosses et du seau d’eau qu’on leur a jetés, insuffisants pour accomplir cette tâche, « prétexte pour que la population puisse donner libre cours à l’antisémitisme, maintenant que c’était permis. » Et du fils de la concierge, arborant dès le lendemain un uniforme SS.
« J’étais devenu un juif ennemi »
« D’un enfant normal, j’étais devenu un enfant juif », résume-t-il sobrement. Plus tard, il dira aussi : « C’est une expérience difficile pour un jeune de devenir un juif, j’allais dire indésirable, mais le mot juste, c’est un juif ennemi ».
La peur monte…
La suite est à lire sur: www.la-croix.com
Auteur: Béatrice Bouniol