Au principe de liquidité totale, opposons la consistance d'être solidaire

Face à la crise démocratique, les travaux de Zygmunt Bauman sociologue, de Bernard Stiegler philosophe et de Cornelius Castoriadis philosophe économiste et psychanalyste nous aident à penser ce délitement d’un être ensemble. Une déliaison consécutive à deux expansions ou plutôt à leur conjugaison additionnelle. En premier lieu, l’avènement des formes d’organisation issues de la rationalité instrumentale qu’importe le secteur alloué. Pour qui s’ajoute la suprématie du monde virtuel composé d’une multitude de points uniques, faux semblables mais irrémédiablement solitaires et sans lien (déconnectés entre eux).

Ces deux phénomènes érigés comme émetteurs de progrès et de modernité sont l’axe de non-retour quant au primat du politique. Puisqu’à contrario, la fonction du politique est de travailler à garder vivantes nos représentations imaginaires et solidaires tout comme les institutions publiques garantes du pacte social. Immanquablement à l’échelon individuel, la crise démocratique se retrouve dans le désengagement d’un nombre croissant de citoyens pour les questions morales et politiques du vivre ensemble. Zygmunt Bauman rapporte ceci à une déviance du monde qu’il qualifie d’un monde comme jeu, venant après l’ère de la rationalité instrumentale, pour définitivement nous soustraire de notre imaginaire commun se référant aux Lumières : ce moment de convergence unique entre progrès, morale, éthique aboutissant à un contrat de biens communs.

Un monde comme jeu où chacun est un univers en soi qui peut être en contradiction avec le précédent ou le suivant. Il inclut à chaque fois l’infini des possibles et est sans conséquence. S’y réfèrent également les notions de vie liquide ou société liquide qui ne peuvent conserver sa forme ni rester sur la bonne trajectoire longtemps. La liquidité, comme avènement de la période post moderne, infiltre toutes les sphères de la vie sociale comme intime. Le monde liquide est la réponse ultime à l’expansion infinie de la rationalité instrumentale de l’époque moderne. Celle qui conduisit à l’avancée fantastique de la science. L’exploit du nucléaire civil comme du séquençage du génome humain souligne l’interdépendance de notre condition à cette domestication des forces en présence. Mais son usage, ne l’oublions pas, peut aussi pactiser avec l’impensable. L’Holocauste et Hiroshima constituent les paroxysmes de son efficacité maximale : l’organisation méthodique d’une solution finale et sa non…

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Auteur: lundimatin