Baptiste Lanaspèze : « Le concept de biodiversité est artificiel »

Wildproject, maison d’édition indépendante basée à Marseille, propose depuis 2009 des pistes pour penser « les sociétés humaines dans leurs relations au vivant, pour mettre un terme à l’extinction en cours de la vie sur Terre ». Rachel Carson, Baptiste Morizot, Vandana Shiva, Carolyn Merchant, Kinji Imanishi… Autant d’autrices et d’auteurs publiés chez Wildproject, qui édite à la fois des essais d’écologie politique et des récits littéraires. À l’occasion de la COP15 biodiversité qui se tient à Montréal (Canada) jusqu’au 19 décembre, entretien avec son fondateur, l’éditeur et auteur Baptiste Lanaspèze.



Reporterre — Depuis quelques années, la question de la nature semble omniprésente au catalogue des maisons d’édition mais aussi en librairies. Comment analysez-vous cet intérêt-là ?  

Baptiste Lanaspèze — On observe en France une effervescence éditoriale autour des humanités écologiques — une expression de la chercheuse australienne Deborah Rose — depuis environ 2015. Celle-ci est notamment liée à deux espaces : militant et populaire d’abord, avec des personnes qui cherchent des livres pour alimenter les luttes dans lesquelles elles sont engagées. La vitalité du rayon écologie en librairies doit aussi beaucoup au monde de la recherche, qui s’est largement emparé de ces sujets — on peut quasiment parler d’une « hype » [mouvement de mode frénétique] académique. Il était temps : ces humanités écologiques existent dans le monde anglo-saxon depuis les années 1980 ! C’est précisément pour tenter de rattraper ce retard que j’ai créé Wildproject, en 2009.

Dans le cadre de notre travail éditorial, on a remarqué un phénomène sociologico-politique très étonnant : le fait que des mots-clés viraux émergent tous les deux-trois ans. En 2015, tout le monde parlait sans cesse de l’Anthropocène. En 2017, c’était la notion d’effondrement, popularisée par Pablo Servigne, qui était au centre des discussions. Et, depuis environ deux ans, le mot-clé principal est en effet celui de « vivant ». Parfois jusqu’à la saturation : on n’en peut plus du vivant, on a envie d’être mort tellement il y a du vivant partout ! (rires)

Mais derrière ce phénomène un peu irrationnel, il se passe quelque chose d’intéressant : cela charrie des univers intellectuels et politiques. Ces mots-clés construisent une culture, des discussions collectives, une scène, une complexité. D’autant que, chez Wildproject, on se retrouve mieux dans cette…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Amélie Quentel Reporterre