Basculements – Mondes émergents, possibles désirables

Dénonçant la notion d’effondrement, qui dépolitise les enjeux en postulant une trajectoire unique et comme jouée d’avance, Jérôme Baschet, enseignant à l’Universidad Autonoma de Chiapas, à San Cristobal de Las Casas, propose celle de « basculements » qui fait place, au contraire, à l’imprévisibilité croissante de notre temps et au rôle central de la mobilisation politique. Alors qu’ « un microscopique fragment de l’à peine-vivant » a provoqué « la paralysie d’une machinerie aussi ample et ramifiée que l’économie mondiale », supposant la reproduction d’autres crises systémiques du capitalisme, il esquisse plusieurs scénarios, dont celui d’une ouverture des possibles qui nous engagerait vers des manières de vivre échappant aux logiques du système-monde capitaliste.

Il tente, tout d’abord, de cerner les tendances principales que la crise du coronavirus a pu induire, amplifier ou affecter significativement : accélération de la numérisation généralisée, modification des équilibres géostratégiques, confirmant l’effritement de l’hégémonie états-unienne et la montée en puissance de la Chine, reconfiguration des circuits de la globalisation, notamment avec un mouvement de relocalisations productives dans un soucis de souveraineté plutôt que dans une perspective écologique, interventionnisme accru de l’État dont on attend une réponse face à la pandémie, que l’on critique ses manquements ou l’excès des mesures d’exception. Toutefois, ce serait une erreur de postuler une « opposition diamétrale » entre néolibéralisme et État, puisque le premier a toujours eu besoin du second pour assurer sa bonne régulation, l’État étant appelé à la rescousse pour socialiser les pertes et se désengageant à nouveau pour permettre la privatisation des bénéfices. Les facteurs de crise sont nombreux et interagissent entre eux : un régime de croissance trop faible ne permettrait plus de satisfaire aux exigences de l’accumulation du capital, en raison de la compression des capacités de consommation du plus grand nombre par les politiques néolibérales, de l’extension démesurée de l’endettement pour y remédier (jusqu’à représenter quatre fois le PIB mondial), de la hausse des coûts de l’énergie et des matières premières, de ceux qu’entraîne le dérèglement climatique, de l’impossibilité de maintenir le faible coût de la force de travail et de celui des ressources naturelles,… Impossible de rapporter davantage ici cette analyse éminemment…

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Auteur: lundimatin