Georg Scholz. — « Industriebauern » (agriculteurs industriels), 1920.
On appelle « amphibologie » une ambiguïté d’origine grammaticale, le plus souvent liée à une incertitude portant sur le découpage syntagmatique. Par exemple : « J’ai vu un chien en vélo » – qu’on peut lire soit comme « [j’ai vu un chien] + [en vélo] », ou bien « [J’ai vu] + [un chien en vélo] ». Un autre exemple : « Ces protagonistes, je ne les connais pas, ma femme non plus ». C’est François Bayrou qui parle. Comment découper ? Pour le chien en vélo, on tranchait assez rapidement. Ici, c’est moins clair, c’est du moins ce que suggère un tweet après que Bayrou a nié, avec le talent qu’on sait, avoir jamais entendu parler de quoi que ce soit à Bétharram alors que sa femme y donnait des cours de catéchisme : « Je ne connais pas cette Elisabeth Bayrou, je ne savais même pas que j’étais marié ». On en est là. À un stade où « Je ne connais pas cette Elisabeth Bayrou » est un prolongement cohérent de la kyrielle invraisemblable de mensonges qui précède.
Lire aussi Serge Halimi, « Fin de règne chaotique pour le président français », Le Monde diplomatique, janvier 2025.
Bayrou donc, et tous les autres à sa suite. À commencer par le petit personnel politique, chargé d’aller défendre l’indéfendable, de nier ou de faire diversion, visiblement sans avoir le moindre scrupule à propos de ce dont ils divertissent. Une mention spéciale, comme d’habitude, pour Elisabeth Borne, qui, sortie après sortie, fait la démonstration d’une humanité à réconforter une porte de garage. Un accessit également pour Juliette Meadel qui voit, elle, la marque indubitable de Trump et Musk dans toute cette affaire – avec probablement la bénédiction de Conspiracy Watch. Tous les autres entonnent « l’instrumentalisation ». Les plus endurcis comme Stéphane Vojetta…
Auteur: Frédéric Lordon