Des arbres gigantesques percent la canopée pour déployer leurs branches à une quarantaine de mètres de hauteur. À leurs pieds, des congénères et ancêtres, morts depuis longtemps, pourrissent lentement, et offrent leurs nutriments à une multitude de plantes, de champignons, d’animaux et de bactéries. Sur un tapis de verdure qui couvre le sol et emplit l’air d’une odeur d’ail des ours, des sentiers témoignent du passage d’animaux.
Parfois, une empreinte démesurée rappelle qu’ici, des bisons d’Europe et des élans, disparus d’Europe de l’Ouest depuis des siècles, évoluent librement. À leur mort, ils sont dévorés par des loups qui, avec les lynx, régulent les autres populations d’ongulés : cerfs, chevreuils et sangliers. La forêt paraît bien plus habitée et vivante que les écosystèmes gérés du reste de l’Europe.
« Bialowieza a été un choc dans mon expérience et dans ma vie, se souvient Pierre Chatagnon, secrétaire général adjoint de l’association Francis Hallé qui œuvre à faire renaître une forêt primaire en Europe de l’Ouest. En la découvrant, j’ai eu l’impression de ne jamais avoir vu de forêt ».
Des cycles biologiques conservés
Si la forêt de Bialowieza couvre une surface totale de plus de 140 000 hectares inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco, le cœur de la partie polonaise, ancienne réserve de chasse des tsars de Russie, est la partie la plus préservée. Elle forme le parc national de Bialowieza depuis 1932 : quelque 10 500 hectares qui n’ont que très peu été exploités par l’humain au fil des millénaires.
En son sein, une zone est interdite au public et accessible seulement à des scientifiques. Une autre partie du parc permet aux visiteurs accompagnés d’un guide de découvrir la forêt.
« Hormis quelques petites réserves, c’est le seul endroit de notre continent où l’on peut observer au même endroit l’entièreté des…
Auteur: Eloi Boye