Chardon a le seum. À mesure qu’elle étend son regard autour d’elle, elle ne constate qu’injustice, exploitation et désolation. Une énième loi sécuritaire, de nouvelles personnes noyées en Méditerranée, une femme violée toutes les dix minutes, et des milliards d’animaux en cage. Elle a le seum, et bien l’intention d’en découdre avec ce monde qui la fait gerber. Alors elle et ses potes commencent à traîner dans le milieu squat/anarchiste/féministe/anti-autoritaire ; un joyeux bordel qui ne prend pas le temps de se définir et qui bouillonne de réflexions comme de propositions concrètes pour nourrir leurs envies d’agir.
Au fil de ses aventures, Chardon entend, et constate, que le pouvoir qu’elle exècre tant existe aussi entre elle et son entourage, qu’il n’est pas l’apanage des institutions, mais qu’il est tristement reproduit dans leur milieu, et dans les relations qu’elle construit. Qu’elle le subit par endroits, et qu’elle le fait subir à d’autres. Alors elle a d’autant plus le seum. D’abord envers ses potes mecs surtout, même si elle apprend vite que les choses sont plus complexes. Chardon est une meuf blanche, mais elle pourrait être brune, neuroatypique ou non, cis ou non binaire, classe moyenne ou prolo, elle se retrouverait quoi qu’il en soit quelque part dans la chaîne alimentaire des oppressions systémiques : en position d’être opprimée par certain.es, et d’en opprimer d’autres. Alors au seum qu’elle construit envers les personnes qui ne veulent pas entendre parler d’oppressions systémiques, ou qui n’en font pas assez, s’ajoute une envie d’être elle–même attentive aux dominations qu’elle reproduit. Elle apprend à nuancer ses propos, à ne pas voir tout noir ou tout blanc. Elle se veut cohérente, et ses aspirations anti-autoritaires la poussent, logiquement, à ne pas vouloir faire partie du camp des oppresseurs. Alors elle lit beaucoup sur le sujet, et apprend…
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