« Ça ne pousse plus » : les huîtres attaquées par l'agriculture intensive

Dolus-d’Oléron (Charente-Maritime), reportage

On pourrait presque croire qu’elle est déserte tant elle est silencieuse. Une fois vidée de ses touristes, l’île d’Oléron, en Charente-Maritime, adopte un nouveau visage. En ce mois de décembre, on ne croise plus que des aigrettes sur le rivage. Les marais s’étendent à l’infini sous leurs pattes, parsemant le paysage dépeuplé de taches argentées. Seule la zone ostréicole, au sud-est de l’île, est en ébullition.

Ciré jaune sur le dos, Roman, 28 ans, s’affaire dans sa cabane à huîtres. La période des fêtes de fin d’année est l’une des plus chargées pour le jeune ostréiculteur. Avant de pouvoir être dégustés à Noël et au Nouvel An, ses mollusques doivent encore être débarrassés de leurs impuretés, puis triés. Les huîtres défilent avec fracas sur le tapis roulant de la calibreuse, qui les classe en fonction de leur poids. Roman fronce les sourcils. Près de la moitié sont trop petites pour être commercialisables. « Ça ne pousse plus », soupire-t-il. Un voile d’inquiétude recouvre ses yeux verts.

Depuis qu’il a quitté son poste dans l’aéronautique pour rejoindre l’exploitation familiale, il y a huit ans, Roman n’a connu que des mauvaises récoltes. « Avant, on avait une mauvaise année tous les dix ans, se rappelle son père Richard, ostréiculteur depuis l’adolescence. Maintenant, on a une bonne année tous les dix ans. C’est la cata. » Avant d’arriver à maturité, les huîtres grossissent pendant trois ans et demi en mer. À l’époque où Richard s’est lancé dans le métier, dans les années 1980, les huîtres pouvaient tripler de volume en moins d’un an. Leur croissance est désormais bien plus lente. Son fils raconte : « Aujourd’hui, si tu veux des huîtres de 70 grammes, il faut qu’elles en fassent plus de 60 quand tu les mets dans les parcs » — c’est en juin qu’a lieu cette « transhumance ».

En parallèle, des mortalités estivales anormales sont observées depuis le début des années 2000 sur tout le territoire. Jusqu’à 85 % des naissains peuvent être décimés en quelques semaines. « Tous les ostréiculteurs vivent la même chose, les gros, les petits… » Père et fils soupçonnent les pesticides.

« L’élevage de coquillages, c’est de la cueillette », explique Jean-François Périgné, mytiliculteur et ancien référent mer à la Confédération paysanne. Avec sa pipe en bois et sa longue chevelure blanche, l’Oléronais a des allures de vieux sage. À…

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Auteur: Hortense Chauvin Reporterre