Cancer du sein et pollution : « L'État se défausse de sa responsabilité »

Chaque année en France, 12 000 femmes meurent d’un cancer du sein et 53 000 nouveaux cas sont détectés. Dans Im/Patiente, qui vient de paraître aux éditions First, les autrices Mounia El Kotni et Maëlle Sigonneau analysent cette maladie sous un prisme féministe et lié à des causes environnementales. À partir du vécu de la coautrice Maëlle Sigonneau, patiente aujourd’hui décédée, elles portent un regard critique sur les violences oncologiques, les injonctions à masquer la maladie et à « conserver sa féminité », ou encore les causes environnementales. Mounia El Kotni, anthropologue spécialiste de la santé des femmes, revient sur ce dernier point.


Reporterre — Dans un chapitre du livre Im/Patiente, vous abordez largement la question de la santé environnementale. En quoi cela s’inscrit-il dans une démarche féministe ?

Mounia El Kotni — Avec Maëlle Sigonneau, nous avons cherché à décaler le regard sur le cancer du sein en partant de l’expérience des femmes. Le féminisme est un projet politique : il pousse à s’interroger au-delà des dépistages, des traitements, et à articuler ce vécu à d’autres questions, comme celle de la santé environnementale. Quand on travaille sur le cancer du sein, on remarque que les patientes sont privées de leur agentivité, de leur droit à s’interroger sur les causes de leur cancer. Celui-ci est encore souvent présenté comme étant « la faute à pas de chance », alors qu’il y a des causes : la génétique, le mode de vie, le fait de ne pas avoir fait ou eu accès à un dépistage à temps.

Toutefois quand on s’interroge sur les causes, en particulier dans le cas de formes plus rares comme le cancer du sein métastatique [à un stade avancé] chez des femmes jeunes, comme c’était le cas pour Maëlle, on ne peut pas éluder ce qui interagit directement avec notre corps : l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, les aliments que nous consommons… C’est pourquoi, dès le début, nous nous sommes penchées sur cette question de l’environnement.



À cet égard, vous montrez qu’il y a une différence entre ce que recouvre le terme « environnement » dans le sens commun, et dans celui des pouvoirs publics.

Lors d’un évènement de la Ville de Paris où le terme « environnemental » était employé pour parler des causes du cancer du sein, Maëlle s’était rendu compte qu’on ne lui parlait pas de la pollution atmosphérique ou de pesticides, mais de comportements individuels : le tabagisme, la mauvaise alimentation, le…

La suite est à lire sur: reporterre.net
Auteur: Mathilde Blézat Reporterre