Ce que la mode du tatouage dit du malaise social — Rorik DUPUIS VALDER

Difficile de voir la mode actuelle du tatouage de la même façon qu’une mode vestimentaire, dans la mesure où celle-ci n’a résolument rien d’anodin ni d’éphémère comme peut l’être le port d’un pantalon ou une coupe de cheveux, mais implique, par le marquage de la peau, l’idée de permanence.

L’on peut raisonnablement se demander ce qui pousse de jeunes gens d’à peine vingt ans – les femmes étant aussi concernées que les hommes – à se noircir l’épiderme d’encre indélébile, au-delà d’un inquiétant mimétisme encouragé par des artistes et sportifs surmédiatisés. Pourquoi un tel besoin de marquage ?

Cet acte « définitif », qui chez beaucoup ressemble plus à de l’automutilation signifiante ou à de l’étiquetage marchand qu’à un quelconque ornement pictural, en dit long sur le malaise d’une société de consommation en fin de vie, où même l’idée de transgression est vouée à la norme et la commercialisation. Faire du tatouage un produit de personnalisation et du corps une surface rentable, c’est là le drame qu’inspire une telle tendance.

Alors qu’il était jusque-là, dans nos sociétés occidentales, l’expression d’une certaine marginalité socio-professionnelle, le tatouage est devenu en l’espace de quelques années une démarche d’appartenance pour une jeunesse – pas nécessairement « branchée » – en perte de repères. La manifestation d’une « transgression conforme », en un paradoxe comportemental qui relèverait plus de la pulsion égocentrique que du libre arbitre, à l’heure de la communication par émoticônes.

Cette démarche « auto-publicitaire », qu’on pourrait associer à une forme de négation de l’intimité et du corps en tant qu’objet naturel de désir, tient à mon sens d’un mécanisme de défense obsessionnel, plus ou moins maîtrisé, dans une société malade où, par le culte de l’immédiat et de la superficialité, l’on tend…

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Auteur: Rorik DUPUIS VALDER