Ce que les rapports de race et de sexe font aux musiques hip-hop en France

40 ans de musiques hip-hop en France, sous la direction de Karim Hammou et Marie Sonnette-Manouguian, co-édité par les Presses de Sciences Po et le Département des études, de la prospective et des statistiques du Ministère de la Culture, 2022.

Les musiques hip-hop constituent aujourd’hui un courant esthétique majeur, singularisé par de nouvelles pratiques instrumentales et vocales, constituant une part croissante de l’industrie musicale. Cette première synthèse des connaissances sur les musiques hip-hop souligne l’importance des transformations esthétiques, politiques, géographiques, économiques, sociologiques auxquelles ces « musiques de producteurs » participent.

Nous publions ici deux extraits de l’introduction consacrés à ce que les rapports sociaux de race et de sexe font aux productions, diffusions et réceptions des musiques hip-hop, en France. Vous pouvez retrouver le sommaire de l’ouvrage ici.

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Les multiples processus de racialisation des musiques hip-hop en France

En tant que genres inscrits dans le sillage des musiques africaines-américaines, les musiques hip-hop héritent de représentations et d’une organisation de l’industrie musicale états-uniennes marquées par l’opposition entre musiques « noires » et musiques « blanches ». Si ce clivage raciste né dans l’industrie du disque dans les années 1920 s’est affaibli après le mouvement des droits civiques des années 1960, il reste prégnant dans les années 1980 et se traduit par un regain de débats autour de la séparation de la programmation radiophonique selon qu’elle s’adresse à des auditeurs pensés comme « blancs » ou « noirs[1] », mais aussi par la stabilisation d’un discours sur l’authenticité du rap états-unien, qui le lie étroitement à la communauté africaine-américaine et à la « blackness[2] ». Ces représentations ne sont pas sans effet en France dès la fin des années 1980 : elles soutiennent ou au contraire compromettent des paris commerciaux[3] ; elles favorisent des investissements symboliques contradictoires d’amateurs victimes de racisme qui voient le rap comme un espace d’affirmation d’une fierté noire[4] ; ou encore, au contraire, elles nourrissent les fantasmes de journalistes et d’acteurs publics qui craignent l’irruption d’une « guerre raciale » sur le sol français[5].

Cependant, c’est aussi l’histoire française des représentations de l’altérité et des logiques racistes qui pèse directement sur le destin des musiques hip-hop en France hexagonale….

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Auteur: redaction