« Cette savoureuse entreprise de démolition »

De l’Internationnale Situationniste, on retient en général Debord et Vaneigem. Cette semaine, Frédéric Thomas nous évoque la contribution d’un personnage très largement méconnu : André Frankin, belge « hors section » membre de l’Internationale Lettriste puis Situationniste et auteur de la pièce de théâtre Personne et les autres dont personne n’avait jamais retrouvé la trace. Coup de bol, Vaneigem, en cherchant dans ses factures, est retombé sur le manuscrit de la pièce. L’occasion donc de présenter ses partis pris au sein de champs pluriels et adjacents ; l’esthétique, la société, les relations, le cinéma, la littérature… Chez Frankin, il s’agit de les démolir en y amorçant des décalages, depuis la position de ceux qu’il appelle « les pauvres bougres ». Bonne lecture !

Un situationniste « hors section »

D’André Frankin (1925-1990), on ne savait, jusqu’à présent, que bien peu de choses : figure intellectuelle belge atypique, résidant à Liège, il avait été membre de l’Internationale lettriste puis de l’Internationale situationniste (IS), mais « hors section », et avait contribué à sa politisation. Quant à sa pièce de théâtre, Personne et les autres (1960), unique incursion situationniste dans le domaine théâtral, ouvrant, aux dires de Guy Debord, un nouveau domaine « pour le scandale situationniste », elle semblait définitivement perdue. On ne la connaissait que par sa préface, publiée en décembre 1960 dans le numéro 5 de la revue Internationale situationniste.

Peu de temps après être entré en contact avec les lettristes, Frankin écrivait en janvier 1955 : « j’espère me joindre à eux dans cette savoureuse entreprise de démolition ». Cette entreprise, il y participe avec le plus d’intensité en 1959-1960, période au cours de laquelle il publie trois articles théoriques et programmatiques dans la revue de l’IS. Mais, un an plus tard, la rupture intervient, en raison principalement d’un désaccord par rapport à la stratégie politique à adopter au lendemain de la Grève du siècle ; la grande grève de l’hiver 1960-1961 qui a secoué la Belgique et même l’Europe. On perd quelque peu la trace d’André Frankin dans la seconde moitié des années 1960.

Raoul Vaneigem, avec qui nous avions discuté de Frankin, a récemment retrouvé un tapuscrit de la pièce dans ses papiers (alors qu’il cherchait une facture de gaz…). Il nous l’a généreusement confiée pour qu’elle puisse enfin être publiée aux éditions La Nerthe. En…

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Auteur: dev