- Noria Derdek, Fondation Abbé Pierre & Marc Uhry, expert en droit européen du logement
La réponse aux enjeux environnementaux n’apparaît largement plus comme une option, mais comme une nécessité. Ce mouvement fait passer l’écologie du registre politique (un choix), à celui de l’ordre juridique (une nécessité). Il irrigue le delta de la pensée écopolitique : de « L’esquisse d’un parlement des choses » de Bruno Latour qui suggère d’« étendre aux choses le privilège de la représentation, de la discussion démocratique et du droit » (la nature serait représentée et protégée au même titre que la personne humaine) à la « Constitution écologique », émise par plusieurs organisations écologiques et personnalités, au premier rang desquelles Nicolas Hulot, qui prévoit l’encadrement des droits et libertés par les impératifs environnementaux (la protection de l’environnement comme finalité ultime de l’action publique).
Les propositions sont fécondes, mais posent des difficultés.
L’affirmation de droits de la nature est loin d’être farfelue, elle pose cependant une question théorique de fond : l’affirmation de droits humains est précisément un mouvement de refus de l’ordre naturel, une extraction de l’humain. Donner des droits à la nature peut contribuer à la dilution de la notion même de droits et de justice, ce qui saboterait l’objectif poursuivi. Certes, déjà, le droit français considère les animaux comme des êtres sensibles et les préserve des mauvais traitements, mais pas au nom de droits qui seraient les leurs, uniquement des obligations qui pèsent sur les humains.
L’hypothèse d’une Constitution écologique est également intéressante, cheminement logique du raisonnement qui veut que les humains et leurs droits n’existent que sur une planète viable et vivable. Mais accepter de contingenter les droits humains à un principe supérieur créerait un précédent risqué : des droits bornés par le climat, c’est revenir sur l’ordre juridique qui affirme leur protection comme la finalité de l’action publique.
Toutes ces options partent d’un constat commun, qui nous semble aujourd’hui le plus sage des fils conducteurs des évolutions à venir : la protection de l’environnement est une condition du plein exercice des droits humains fondamentaux, même le plus nodal et le plus inattendu des droits menacés par l’imprévoyance…
Auteur : Nabli Béligh
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