Changement climatique : Total savait

Un demi-siècle. Cela fait cinquante ans, au moins, que Total est au courant de l’existence du changement climatique, de ses causes et de ses conséquences. Mais la majeur pétrolière a longtemps nié ces alertes et semé le doute sur l’état des connaissances scientifiques afin d’extraire toujours plus de combustibles fossiles. Voilà les conclusions d’une étude menée par des chercheurs en sciences humaines sur le positionnement adopté par Total — et par Elf, absorbée par Total en 1999 — à l’égard de sa contribution au changement climatique ces cinq dernières décennies.

Publiée mercredi 20 octobre dans la revue Global Environmental Change, l’étude a été réalisée par les chercheurs français Christophe Bonneuil, Pierre-Louis Choquet et l’Étasunien Benjamin Franta à partir d’archives et d’entretiens avec d’anciens dirigeants de Total et d’Elf. Elle apporte un regard nouveau sur les multinationales françaises — ce type de recherches a jusqu’alors surtout été mené dans le champ anglo-saxon. Celles-ci sont précieuses pour mettre au jour les efforts déployés par l’industrie des hydrocarbures pour produire de l’ignorance autour du changement climatique et lutter contre la régulation de ses activités. Des politiques aux conséquences désastreuses : l’extraction annuelle des combustibles fossiles a septuplé au cours des soixante-dix dernières années, et vingt entreprises du secteur des énergies fossiles sont responsables de plus d’un tiers des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde depuis 1965.

Un pétrolier détenu par Total aux larges des côtes de l’Angola, en 2018. © Rodger Bosch / AFP

En 1971, Total savait : son propre magazine faisait le lien entre réchauffement du climat et hydrocarbures

Depuis quand Total connait-il l’existence du changement climatique ? Dès le début des années 1950, plusieurs acteurs de l’industrie pétrolière, notamment les membres de l’organisme American Petroleum Institute (API), avaient reçu des alertes. Ils ont commandité des recherches sur le sujet vers la fin des années 1960. Ces travaux concluaient déjà qu’une l’utilisation accrue des combustibles fossiles contribuerait à un réchauffement climatique lourd de conséquences pour les populations du monde. Total, membre de l’API par sa filiale nord-américaine, pourrait avoir eu accès à ces résultats.

De façon plus certaine, la recherche de MM. Bonneuil, Choquet et Franta montre que Total avait pleinement conscience du potentiel destructeur de ses…

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Auteur: Alexandre-Reza Kokabi (Reporterre) Reporterre