Il y a dores et déjà un préalable qu’il faut établir [NDA : et qui me concerne autant que Frédéric Lemaître] : il est fondamentalement impossible, même dans la durée, d’appréhender pleinement un pays, sa culture et ses mentalités sans en parler la langue avec un minimum d’expertise. Et encore y a-t-il un bémol : vivre en Chine même en ayant conquis le mandarin qui permet de communiquer avec tous les Chinois, cela n’ouvre aucunement les portes des compréhensions secrètes ou des conversations volées, puisque la majorité des Chinois parlent entre eux les dialectes qu’ils partagent et qui sont toujours vivaces. En parlant le mandarin, on peut comprendre les Chinois qui nous parlent mais pas nécessairement les Chinois qui se parlent. En outre, cette lacune linguistique s’aggrave considérablement lorsqu’on s’avère incapable de mettre en perspective l’instant t d’une société, quelle qu’elle soit, avec son histoire. Et l’on peut deviner sans peine combien celle-ci est essentielle à prendre en compte lorsqu’il s’agit de la Chine.
Car cinq ans dans l’histoire de la Chine, ce n’est qu’un clignement d’yeux. Or, ces références nécessaires à une compréhension de la société chinoise contemporaine sont globalement absentes du livre de Lemaître, et si parfois, il s’appuie sur des faits passés, ceux-ci sont le fruit d’un cherry-picking opportun. Lorsque par exemple il invoque Ursula Gauthier, cette ancienne correspondante du Nouvel Observateur en Chine, c’est pour à nouveau affirmer que celle-ci, comme elle-même l’avait prétendu à l’époque, a été expulsée de Chine pour les propos tenus dans un de ses articles. Premièrement, elle n’a pas été expulsée, on lui a juste refusé le renouvellement de son visa. Mais la rhétorique de l’expulsion laisse dans l’imaginaire la trace d’une violence subie quand celle d’un non renouvellement de visa la réduit au rang de contingence…
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Auteur: Xiao PIGNOUF