Claire Hédon, Défenseure des droits : « L'intersectionnalité n'est pas un gros mot »

Basta! : Concernant la loi instaurant un passe vaccinal, vous avez pointé le risque d’ « un glissement insidieux vers la pérennisation d’un dispositif d’exception ». Concrètement, comment le passe vaccinal pourrait-il durablement remettre en cause « l’exercice de nos droits et de nos libertés » ?

Claire Hédon : La crise que nous traversons nécessite des mesures exceptionnelles. Là-dessus, il n’y a pas de doute. Mais mon rôle est de rappeler que le respect des libertés doit demeurer la règle et les restrictions l’exception. Dans notre État de droit, trois exigences fondamentales peuvent justifier de restreindre les libertés : il faut que celles-ci soient absolument nécessaire, proportionnelle, et temporaire. Donc forcément je suis inquiète de l’instauration d’un passe vaccinal sans obligation de nouvelles discussions devant le Parlement avant juillet. Pour des restrictions de libertés importantes, ce délai est très long.

Notre démocratie s’appuie sur le Parlement, il a un rôle essentiel à jouer. Défendre les droits et les libertés, ça ne veut absolument pas dire être contre la vaccination. Je suis vaccinée, je pense que la vaccination aide à nous en sortir. Lors de l’examen du texte de loi, le Sénat a essayé d’imposer une limite à ce passe vaccinal en fonction du nombre de contaminations. Que ce soit ce critère ou le fait de retourner tous les mois devant le Parlement pour reconduire ou non le passe vaccinal, je pense qu’il y avait un chemin moins attentatoire aux libertés. D’autre part, il existe encore une différence importante de taux de vaccination entre la population générale et les populations en situations de pauvreté. Quand on voit par exemple l’écart entre la Seine-Saint-Denis et Paris [respectivement 66,4 % de la population ayant reçu au moins une dose au 1er février, et 83 % à Paris, ndlr], cela ne peut que nous interpeller.

Comment expliquez-vous ce phénomène, c’est un problème d’accès aux vaccins, d’informations, d’inquiétudes ?

« Être vacciné, être favorable à la vaccination n’empêche pas qu’on puisse se poser des questions. Il ne faut pas qu’on s’habitue aux atteintes à nos libertés »

Les personnes en situation de précarité n’ont, souvent, pas de médecin traitant. Elles ont beaucoup plus de mal à se projeter dans les questions de prévention, la prise de rendez-vous est compliquée. C’est pour cela qu’il est important d’aller au plus proche des personnes. Le gouvernement a fait des efforts mais il…

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Auteur: Ivan du Roy, Pierre Jequier-Zalc