Comment fait-on pour que les hommes cessent de violer ?

C’est le dernier shitstorm en date sur Twitter. Les comptes (initialement militants et féministes) qui ont publié cette phrase se sont trouvés bloqués ou suspendus. 

En suspens la phrase : « Comment fait-on pour que les hommes cessent de violer ? »

Pourtant cette phrase n’est pas agressive, pourtant elle n’est pas insultante, pourtant elle est même conforme à la réalité sociologique du viol (bah oui, la majorité des violeurs sont des hommes, voir – notamment – les travaux que mène la sociologue Véronique Le Goaziou depuis plus de 15 ans). 

Sur les faits eux-mêmes, la suspension a été levée, les tweets supprimés ont été rétablis, et Twitter France a plaidé … « l’erreur de modération » (sic). On pourrait donc en rester là. Mais comme tout cela me semble assez révélateur et intéressant de phénomènes (et d’erreurs ou d’excuses) de plus en plus fréquent.e.s et qu’un arbitraire total semble toujours de mise, je vais quand même vous en toucher deux mots 🙂

Cet épisode est « intéressant » à plus d’un titre si on l’observe uniquement pour comprendre la manière dont il structure les échanges autour de « faits de société » à l’échelle des médias sociaux, une structuration d’autant plus paroxystique qu’elle met en scène une articulation entre les dimensions privées du fait concerné et la caractérisation publique qui le rend soit insupportable et condamnable, soit l’élève au rang de cause que l’on ne peut que soutenir. Cette dimension paroxystique tient à la nature même des médias sociaux, espaces depuis l’origine semi-publics ou semi-privés et qui ne sont jamais aussi féconds, puissants mais aussi dangereux dès lors qu’y sont traités des sujets ou des faits qui eux-mêmes relèvent d’une articulation entre la dimension privée ou intime de l’action et la vertu publique de la parole.

« Voici un assassinat : s’il est politique, c’est une information, s’il ne l’est pas, c’est un fait divers.« 

Voilà ce qu’écrivait Roland Barthes dans le chapitre « Structure du fait divers » (accessible en pdf) de ses Essais Critiques (1964). 56 ans après lui nous pourrions écrire : « Voici un tweet : s’il est politique, c’est une information, s’il ne l’est pas, c’est un fait divers. » 

« Comment fait-on pour que les hommes cessent de violer ? »

Ce tweet est (évidemment) politique, c’est (donc) une information. C’est aussi un fait divers. Car il n’est (évidemment) pas que politique. Reste que chaque viol est un assassinat. 

Barthes qui dans le même texte toujours à propos du fait divers écrivait aussi : 

« le fait…

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Auteur: olivierertzscheid Olivier Ertzscheid