Comment (presque) tout calculer grâce aux « problèmes de Fermi »

Les ordres de grandeur sont fréquemment utilisés dans les sciences, mais surtout dans les sciences de l’ingénieur et permettent aussi de répondre à des questions qui peuvent paraître insolites telles que : combien de litres d’essence sont consommés par les automobiles en France quotidiennement ? Ou combien possède-t-on d’atomes ayant appartenu à Cléopâtre ? Il est possible de répondre assez facilement à ce type de questions, connues sous le nom de « problèmes de Fermi », en utilisant quelques données de base. Ils sont particulièrement bien adaptés pour aborder de manière scientifique les enjeux énergétiques dont il est question actuellement : par exemple, quelle serait la consommation journalière en charbon d’une chaudière de puissance analogue à celle d’un réacteur nucléaire, c’est-à-dire de l’ordre de 1 Gigawatt ?

Cette démarche a été développée par le physicien nucléaire Enrico Fermi (1901-1954) qui posait ce type de problèmes à ses étudiants de l’Université de Chicago.

Enrico Fermi a fait ses études à l’université de Pise, puis dans les principaux centres de physique théorique d’Europe. En 1926, il devient professeur à l’université de Rome, et, à partir de 1932, il concentre ses recherches sur la physique nucléaire qui le conduiront à l’obtention du prix Nobel de Physique de l’année 1938. En 1939, Fermi émigre aux États-Unis avec sa famille pour fuir le fascisme et devient professeur de physique à l’université de Columbia.

Résolution d’un problème de Fermi

En voulant résoudre un problème de Fermi, on sait dès le début que le résultat sera compris entre deux puissances de 10 successives (10, 100, 1000…), et ne sera qu’un ordre de grandeur. Le point de départ réside bien sûr dans l’analyse du problème à traiter, en identifiant les paramètres physiques qui interviennent dans le phénomène étudié, et en évaluant leurs ordres de grandeur.

À ce niveau, on perçoit l’utilité des divers enseignements que chacune et chacun d’entre nous a reçus tout au long de sa scolarité, quelle que soit la matière étudiée : valeur du rayon de la Terre dans le cours de géographie, production de l’électricité avec les barrages, ou avec des centrales thermiques à gaz, à charbon, ou nucléaires dans les enseignements de physique et de technologie.

Très souvent, il n’est pas possible de proposer un ordre de grandeur unique pour une donnée physique. Dans ce cas, on fait appel à la notion de moyenne géométrique qui permet de conserver le concept de départ choisi (on reste entre deux puissances de 10 successives).

Encadrement d’une grandeur entre deux valeurs estimées.● On cherche une valeur V que l’on évalue située entre deux valeurs V_1 et V_2, avec V_2>V_1.● On veut que V soit tel que V=αV_1 et que V_2=αV. Ceci conduit à calculer V selon la moyenne géométrique de V_1 et V_2.● V=√(V_1 V_2)

Reprenons notre problème

Quelle est la puissance électrique typique en sortie d’un alternateur de centrale nucléaire ? Les données sont variées, et vont de 500 MW (réacteur de Saint-Laurent) à 1 600 Mégawatts (MW) pour un EPR. La valeur calculée est V=√800 000 soit environ 900 MW. Comme nous nous intéressons aux ordres de grandeur, on arrondit à 1 000 MW, soit 1 Gigawatt. Les calculs numériques n’en seront que plus simples !

Quelques données utiles pour traiter notre problème de Fermi :● 1 electronVolt (eV) = 1.6 10-19 Joules(J)● Masse volumique de l’air (conditions normales) = 1.29 kg/m3● Énergie de réaction C+O_2→〖CO〗_2 = 1.5 eV● Énergie de réaction de fission du noyau d’uranium 235U = 200 MeV● Masse molaire du 12C = 12 g/mol● Nombre d’Avogadro = 6.1023 mol-1

On considère un réacteur nucléaire de puissance électrique égale à P=1GW. En tenant compte du rendement de Carnot de 30 % de cette machine thermique, il est nécessaire de consommer une puissance thermique P=3.3GW.

On considère un réacteur nucléaire de puissance électrique égale à P=1GW. En tenant compte du rendement de Carnot de 30 % de cette machine thermique, il est nécessaire de consommer une puissance thermique P=3.3GW.

En effet, le rendement de Carnot est le rendement maximum que peut avoir une machine thermique idéale, cette dernière étant définie comme un dispositif capable de transformer de la chaleur en travail. Le rapport entre le…

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Auteur: Charles de Izarra, Chercheur, INSA Centre Val de Loire