En 1609, paraissent les Commentaires royaux sur le Pérou des Incas, de l’Inca Garcilaso de la Vega, – premier livre publié en Europe d’un américain qui s’identifie comme “indien“ » – qui auront un impact durable et profond dans l’histoire des idées politiques et économique en Europe et en Amérique du Sud, suscitant l’intérêt des réformateurs et des révolutionnaires, devenant une référence majeure au XVIIIe siècle, notamment pour sa description du « bon gouvernement » des Incas, fondé sur « une conception de la justice redistributive et de la justice sociale beaucoup plus avancée que celle qui existait alors dans les sociétés européennes ». Professeur de philosophie et d’études latino-américaines à l’université de Tours, Alfredo Gomez-Muller présente ce texte, son origine et sa réception à travers les époques, le discrédit régulièrement jeté sur lui, preuve du pouvoir déstabilisateur qu’il contient.
Il prévient que son but n’est pas de discuter la validité historique des descriptions de l’Inca Garcilaso, mais d’établir la présence de cette référence au sein des longues mémoires « utopique » qui ont contribué au renouvellement des pratiques et théoriques politiques en Europe comme en Amérique latine.
L’Inca Garcilaso de la Vega est né en 1539. Sa mère, Chimpu Ocllo, nièce de Huayna Cápac, le onzième souverain des Tawantinsuyo, cet immense empire construit dans les Andes, appartenait à une lignée de l’élite sociale inca. Son père était le capitaine Sebastián Garcí Lasso de la Vega y Vargas, membre de l’expédition venue en renfort pour faire face à la résistance inca, et deviendra maire et juge suprême de Cuzco. Alfredo Gomez-Muller restitue aussi le contexte des bouleversements et de la violence apportés par la colonisation, du nouvel ordre social hiérarchisé, instauré sur la base de la « pureté du sang » (limpieza de sangre) et distinguant…
Auteur: dev