Cette tentative de « naturaliser » les problèmes économiques et sociaux a une double conséquence au sein de l’opinion publique internationale. D’une part, elle établit une tendance à s’en remettre au « hasard » ou à « la malchance » pour comprendre l’Histoire récente du pays. Comme conséquence de cette « naturalisation » des « problèmes » de l’ile, aucune cause politique n’est prise en compte au moment d’expliquer les situations de rébellion qui secouent Haïti depuis maintenant quatre ans.
D’autre part, cette absence de référence politique laisse penser que les haïtiens sont incapables de résoudre seuls leurs problèmes économiques et sociaux. Et que, par conséquent, ils auraient besoin de manière récurrente d’une « aide » extérieure, qui, dans l’histoire du pays, s’est de nombreuses fois concrétisée par la violation de la souveraineté haïtienne.
Pourtant, cette image d’Épinal d’un pays martyrisé par la fatalité est venue se fracasser sur l’icône d’un peuple en lutte, dont les mobilisations réunissent plusieurs centaines de milliers de personnes dans les rues du pays.
Comment comprendre alors ce qui se passe en Haïti ? Pourquoi ce noble Peuple continue de se rebeller si leurs malheurs sont dû à l’action d’une force immanente qui leur échapperait ?
Pour saisir ce qui se joue actuellement en Haïti, il faut réinjecter une lecture politique et reprendre la chronologie -au moins la plus récente- des évènements qui explique la colère de la majorité des secteurs du Peuple haïtien.
Un pays dévasté par le libéralisme
Le pays caribéen n’a pas été hermétique au changement économique mondial. Depuis la fin des années 80, le pays va être dévasté par la lame de fond du néolibéralisme. Le protectionnisme économique qui avait favorisé le développement durable des producteurs agricoles locaux est sacrifié, et les barrières douanières levées. Les produits agricoles subventionnés des États-Unis (et aussi de la République dominicaine) inondent alors le marché haïtien. En quelques années, le pays passe de l’autosuffisance alimentaire à l’importation de 57% de ses denrées agricoles. La question de la faim en Haïti n’est ni une punition divine ni une fatalité naturelle, elle est le résultat de l’imposition des politiques néolibérales par les institutions financières, avec la complicité d’une bourgeoisie compradore disposant de solides relais politiques. Qui plus est, au cours des années 90, de grandes campagnes de…
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Auteur: Romain MIGUS Le grand soir