Comprendre les mouvements du manteau terrestre à l’origine de la tectonique des plaques

Nous publions, aujourd’hui 11 janvier, un article scientifique dans la revue scientifique Nature présentant les résultats de notre modélisation afin de mieux appréhender les mouvements du manteau terrestre à l’origine de la tectonique des plaques.

La tectonique des plaques qui caractérise la dynamique de notre planète est difficile à dater mais elle existerait depuis au moins 2 milliards d’années. Le supercontinent appelé Gondwana qui s’est formé il y a 600 millions d’années aurait commencé à se fracturer au Jurassique (il y a 160 millions d’années).

Les Pyrénées, montagne jeune, ne datent que d’environ 40 millions d’années. Comment appréhender ces durées, nous pauvres humains, pour qui passer 100 ans à la surface de la Terre représente déjà un fort long séjour ? C’est la science et ses outils observationnels, analytiques et conceptuels qui ont permis de dépasser les mythes et qui aboutit à ces nombres qui donnent le tournis. Nous sommes donc un peu comme des éphémères, ces insectes qui ne vivent qu’un jour ou deux, qui tenteraient de comprendre les saisons, les années…

La science, c’est aussi l’expérimentation. Mais là encore, comment reproduire des phénomènes qui se déroulent sur des durées bien plus longues que celles de nos vies ?

Prenons la dynamique de notre planète. La tectonique des plaques est le cadre conceptuel qui, depuis les années 60, rassemble et unifie les descriptions des grandes manifestations géologiques qui ont façonné la surface de la Terre. Mais son origine est plus profonde. Le déplacement des plaques résulte de vastes mouvements de convection qui animent le manteau terrestre et permettent à la Terre d’évacuer sa chaleur interne. Car la Terre est encore une planète chaude, d’où son activité. Plus de 98 % du volume de notre planète est à des températures supérieures à 1000 °C et le noyau est aussi chaud que la surface du soleil.

Structure de la Terre. 1. croûte continentale, 2. croûte océanique, 3. Manteau supérieur, 4. Manteau inférieur, 5. noyau externe, 6. noyau interne.
Dake/Wikipedia, CC BY

Cette chaleur interne à plusieurs origines : une part de chaleur primordiale (vestige de la formation de notre planète par accrétion), une autre qui est extraite du noyau en partie due à la cristallisation de la graine (partie solide, centrale, du noyau), et enfin une autre qui provient de la désintégration radioactive d’éléments (uranium, potassium, thorium) présents en faible quantité dans les roches du manteau. C’est donc par transport de matière du bas (où les températures sont les plus élevées) vers le haut (où elles sont les plus froides) que cette chaleur est transportée. La particularité de ce phénomène convectif (bien connu dans les liquides, on fait d’ailleurs souvent l’analogie avec la casserole d’eau sur le feu) est que dans le manteau terrestre constitué de roches solides, il est porté par la déformation de ces roches et des minéraux qui les constituent. Ce sont donc ces déformations qu’il nous faut étudier si l’on veut comprendre et modéliser la dynamique de notre planète. Mais cette quête est parsemée de difficultés. Listons-en quelques-unes.

Des conditions de pression et de température extrêmes dans le manteau

Le manteau terrestre est cette enveloppe de roches, nous l’avons dit, qui s’étend jusqu’à près de 2900 km sous nos pieds. Les conditions de pression et température qui y règnent y sont extrêmes. En particulier, sous le poids des roches, la pression augmente fortement avec la profondeur pour atteindre quelque 135 GPa (1,35 milliard de fois la pression atmosphérique) à l’approche du noyau. Les roches qui sont présentes à ces profondeurs ne sont pas celles que l’on rencontre à la surface de la Terre. Sous l’influence de la pression, elles sont constituées de minéraux plus compacts, plus denses. Pendant la seconde moitié du XXe siècle, des efforts importants ont été déployés pour développer des expériences permettant de reproduire les conditions de pression et de température de l’intérieur de la Terre.

Observation de bridgmanite.
Fourni par l’auteur

Elles ont permis d’étudier la manière dont les minéraux se densifient…

La suite est à lire sur: theconversation.com
Auteur: Patrick Cordier, Professeur de Physique, spécialiste de physique des minéraux, membre de l’Institut Universitaire de France, Université de Lille