Conquérir le désert

« Pourquoi insister ? Le colonialisme semble une vieille question. On ne voit plus ces fanatiques, sanguinaires, ignares et ridicules conquistadores espagnols se promener avec leur croix et leurs épées. Les pays du tiers-monde sont indépendants. Ne restons pas esclaves du passé alors, vivons dans le présent, regardons le futur… » Dans ce texte, Guillermo Kozlowski revient sur la place du désert dans la géographie, l’imaginaire et les stratégies coloniales. Conçu comme une étendue vide et stérile même lorsqu’il est plein et peuplé, il est le produit d’une opération permettant de justifier la conquête, la colonisation, la civilisation. Ces arguments sont relativement connus mais l’article les déploie avec des exemples moins courants, comme la « conquête du désert » en Argentine au 19e siècle après la Révolution et l’indépendance du pays face aux conquistadors espagnols en 1816. Bonne lecture.

Merci beaucoup à Paola Stévenne pour son regard sur ce texte et tant d’autres.

Pourquoi insister ? Le colonialisme semble une vieille question. On ne voit plus ces fanatiques, sanguinaires, ignares et ridicules conquistadores espagnols se promener avec leur croix et leurs épées. Les pays du tiers-monde sont indépendants. Ne restons pas esclaves du passé alors, vivons dans le présent, regardons le futur…

Déjà au XIX ème siècle la colonisation commence à se présenter elle-même comme l’instant pendant lequel a lieu une rupture. Elle prétend être le point d’inflexion entre l’épuisement d’un monde archaïque et le début du monde moderne, se défend de plus en plus d’être une modalité du pouvoir ; c’est peut-être pour cela qu’elle semble toujours une problématique du passé, un débat déjà clos. C’est peut-être pour cela aussi qu’il faut aller chercher la présence du colonialisme dans une image paradoxale. Non pas les images dépassées de l’évangélisation forcée du XVI ème siècle, ou de la lourde administration coloniale du XIX ème , mais la « conquête du désert » qu’il n’a cessé de revendiquer à partir du dernier quart du XIX ème siècle. Une image qui encore aujourd’hui, peut-être plus qu’à ses débuts, sert de modèle pour la politique « d’aménagement » des territoires et de « gestion » des populations.

D’où cette invitation au voyage, d’un désert à l’autre. La Pampa (sur laquelle je m’entendrai un peu plus, dans la mesure où son histoire est moins familière), le Sinaï, le Sahara, le Far-West, qui lui font écho….

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Auteur: lundimatin