Contre le bulldozer du « progrès », trois siècles de luttes environnementales

En 1827, alors que le nouveau Code forestier réduisait drastiquement les droits d’usage traditionnels dans les forêts françaises, des insurrections éclatèrent un peu partout dans le royaume. L’une d’elles marqua les esprits. En Ariège, des montagnards habillés de manière carnavalesque défièrent et ridiculisèrent pendant plusieurs années les notables locaux et les autorités policières. C’est la « guerre des Demoiselles ». Deux siècles plus tard, en hommage à l’un des meneurs de l’insurrection , le philosophe cévenol Jean-Baptiste Vidalou, auteur d’Être forêts, s’en inspira pour créer son nom de plume.

Bien qu’elle ne se réclamât pas de l’écologie — et pour cause, le mot n’est apparu qu’en 1866 sous la plume d’Ernst Haeckel et n’a pris sa coloration scientifique qu’une trentaine d’années plus tard, sous l’impulsion du Britannique Arthur Tansley —, cette proto-Zad fait figure de modèle des luttes environnementales. Une histoire des luttes pour l’environnement en retrace la longue histoire. Dans cet ouvrage superbement illustré, les chercheurs Anne-Claude Ambroise-Rendu, Steve Hagimont, Charles-François Mathis et Alexis Vrignon dressent le panorama des luttes environnementales sur l’ensemble de la planète entre les XVIIIe et XXe siècles.

Même si l’on pourrait envisager des conflits antérieurs au prisme de l’écologie, c’est en effet durant ces trois siècles que la défense pour l’environnement a pris tout son sens actuel, dans la mesure où l’idéologie du progrès technique et scientifique vise à transformer la nature en un réservoir de ressources exploitables à loisir — et donc à en éradiquer des modes de vie plus soucieux du vivant. Contrairement à un certain mythe qui voudrait faire débuter l’écologie politique au réveil des années 1960 et 1970, les protecteurs de la nature ont combattu les attaques et les arguments des entreprises et de l’État dès les prémices de la révolution industrielle.

C’est donc à une histoire par le bas des luttes environnementales que nous convie cet ouvrage. On pourra lire, en complément, Les Révoltes du ciel de Jean-Baptiste Fressoz et Fabien Locher, qui retrace la généalogie intellectuelle de l’anthropocène. En menant ainsi l’archéologie de la catastrophe contemporaine, ces deux livres révèlent que cette dernière n’avait rien de fatal et par conséquent, pour reprendre l’introduction d’Une histoire des luttes pour l’environnement, qu’« une partie du désastre actuel est la conséquence…

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Auteur: Maxime Lerolle Reporterre