Contre les mégabassines, « nous sommes condamnés à agir »

Niort (Deux-Sèvres), reportage

Avec un peu de chance, on aurait pu apercevoir des chevreuils sautillant dans le chemin plongé dans les ténèbres. Mais ce soir-là, ils sont restés cachés dans les prés entourant la ferme où vit Thomas, dans les Deux-Sèvres. Seuls deux yeux brillants d’un renard ont jailli de la nuit, éclairés par les phares de sa voiture. Les terres bordant l’exploitation familiale sont une réserve de chasse, véritable refuge pour la faune de la région. Un territoire aujourd’hui célèbre pour sa lutte contre les projets de mégabassines, ces contestés réservoirs d’eau dédiés à l’agriculture industrielle. Thomas fait partie des opposants historiques. Le jeune paysan boulanger a participé aux nombreuses manifestations, dont celle de Mauzé-sur-le-Mignon en septembre 2021. À l’époque, il avait versé du son de blé dans le réservoir hydraulique d’un engin du chantier.

Accusé de dégradation de bien d’autrui, il a comparu au tribunal correctionnel de Niort (Deux-Sèvres), vendredi 6 janvier. À ses côtés, quatre autres militants — dont deux agriculteurs — accusés de dégradations et de violences envers les gendarmes. Leurs avocats ont plaidé la désobéissance civile et l’état de nécessité. Des arguments balayés par la procureure de Niort. « Évidemment, il y a une urgence climatique. Quand il fait 15 °C un 6 janvier, on voit qu’il y a un problème. Mais cette urgence ne peut pas justifier des actes de violence à l’encontre d’autres êtres humains. »

Le visage grave, les cheveux bruns ramassés en chignon, Thomas a été le seul des cinq prévenus à prendre la parole durant l’audience pour expliquer son acte. « Tant que les principes de base du vivant ne sont pas pris en considération, rien ne changera notre détermination. Nous sommes condamnés à agir, » a-t-il déclaré dans un émouvant plaidoyer contre les mégabassines.

« Il s’agit d’une captation d’eau potable au profit d’une minorité »

Passionné d’ornithologie, Thomas, 32 ans, est originaire du Pays basque. Pendant une dizaine d’années, il a bourlingué dans toute la France comme éducateur à la nature, avant d’être embauché par la réserve naturelle nationale du marais de Lavours (Ain). En parallèle, il s’est formé au maraîchage dans la ferme où il vit aujourd’hui, celle de la famille de sa compagne, Agathe. Des terres cultivées depuis six générations. En 2010, son beau-père, Fabrice, a décidé de convertir l’exploitation à l’agriculture biologique, après des décennies de conventionnel. « À l’époque, les bidons de produits chimiques s’entassaient dans la cour », se souvient Simon, le frère d’Agathe et beau-frère de Thomas. « Mon…

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Auteur: Laury-Anne Cholez Reporterre