Critique d'une transparence sans fin

Smartphone, smartcar, smartbuilding, smartlight, smartcooling et même smart dust, tout ce qui nous entoure semble devenir intelligent, smart, jusqu’à la ville de demain, la smart city promue par les ingénieurs et les politiques urbaines. La smart city se présente comme un nouvel espace de vie accessible et régulable en temps réel, totalement transparent et saisissable. Un nouvel espace qui répondra à tous les enjeux de notre temps, écologiques, sociaux, politiques et économiques.

Mais quelle est la part de fantasmes dans ces visions post-cybernétiques ?

Quels mondes produisent-elles ? Pour qui et pour quoi ?

Contre une vision mystifiée et inerte de l’intelligence des villes, en mobilisant Henri Lefevbre, Gilbert Simondon, mais aussi J. G. Ballard et Italo Calvino, ce livre entend redonner à l’intelligence toute sa dimension matérielle, faire voir de quoi son image de transparence est faite. Il se propose de fragmenter et d’épaissir la notion d’intelligence, pour défaire un discours contemporain sur l’intellience des villes qui ne semble tenir à rien, ni à la ville ni à ses habitant•es et s’imposer partout.

Sortie le 26 mai, aux toutes nouvelles et excellentes éditions Météores.

Scènes de villes intelligentes

L’image d’une ville dépeuplée nous hante. L’historien Patrick Boucheron propose une analyse du célèbre frontispice du Léviathan de Thomas Hobbes. Une ville déserte (sans doute ravagée par la guerre ou la peste) s’étale devant le corps immense et immonde du Léviathan, corps artificiel du souverain composé de tous les corps d’habitant·es, comme aspirés par sa volonté. Ils l’habitent autant qu’ils sont habités par lui. On aperçoit un rideau de théâtre qui sertit le paysage et des coulisses qui le flanquent. Tout cela n’est qu’un spectacle. Une coupe sur les coulisses nous expose les symboles et techniques de gouvernement spirituel et temporel. Boucheron y voit une des…

La suite est à lire sur: lundi.am
Auteur: dev