Berlin (Allemagne), reportage
La chaleur se fait ressentir en ce début d’après-midi dans le « luch » de Kremmen au nord-ouest de Berlin. Un luch est un marais dans le dialecte brandebourgeois. Là où, en hiver, l’eau déborde des fossés et où les teintes du paysage tirent dans les verts foncés, les rayons du soleil de juillet écrasent désormais la végétation et jaunissent les bords de route.
Ce n’est qu’en arrivant aux abords de la ferme de Sebastian et Juliane Petri que l’air se rafraîchit. Devant leur portail, des lentilles d’eau flottent à la surface d’un large fossé encore rempli d’eau. Une exception à Kremmen. « Si je compare les niveaux d’eau avec mes voisins, j’ai bien un mètre de plus dans mes canaux », dit Sebastian. Une grenouille saute dans les lentilles. « Il y en a quelques-unes qu’on entend le soir, mais aujourd’hui moins que lorsque j’étais plus jeune. »
Traditionnellement, les fossés qui bordent les prairies forment un réseau de canaux de drainage reliés à une pompe pour assécher les sols. Cet assèchement permet de faire pousser de l’herbe de pâturage pour nourrir des vaches laitières… mais dégrade le sol qui part littéralement en poussière. « Chaque année, le marais perd un à deux centimètres à cause du drainage ou de la sécheresse », résume Sebastian.
Pour remouiller ses parcelles, Sebastian a bouché les canaux drainants. © Guillaume Amouret / Reporterre
Le couple a donc décidé de boucher certains de leurs canaux pour garder l’eau dans leurs parcelles et pratiquer la paludiculture. L’exploitation de la famille Petri reste un cas particulier en Allemagne où seuls 4 % des marais sont encore humides. Le reste est drainé et consacré à l’usage agricole ou à l’extraction de tourbe. Les zones humides sont pourtant capitales : les tourbières représentent à peine 3 % des terres émergées mais stockent environ 30 % de la totalité du carbone des sols mondiaux.
Sebastian a grandi dans le luch. Après des études d’agronomie à Berlin et une première expérience dans la région de Ravensburg, sa femme et lui ont décidé en 2015 de revenir dans le village de son enfance. Avec l’intention de pratiquer une agriculture différente que celle qu’il a connue : une culture de foin sur prairie humide, sans aucun intrant. La tourbe de marais ne permet pas de faire pousser d’autre culture. « Notre foin est en majeure partie composé de faux roseaux (baldingère). Cette plante n’est pas trop filandreuse, elle convient à…
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Auteur: Reporterre