Dans la réserve du Lauvitel, les scientifiques observent vingt-cinq ans de montagne sans humains

Lac du Lauvitel (Isère), reportage

C’est un matin de printemps comme les autres à 1 500 mètres d’altitude. Deux chamois petit-déjeunent sur un replat, une marmotte se faufile entre les jeunes myrtilles. Au milieu des épicéas, les feuilles des alisiers pointent à peine. Un pinson des arbres (Fringilla coelebs) et un troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes) chantent de concert. « Sans ciel voilé, on entendrait le chant des tétras lyre (Tetrao tetrix), dont l’activité est plus dynamique quand il fait beau », ajoute Jérôme Forêt.

Le technicien du parc national des Écrins a gravi à la fraîche les 600 mètres de dénivelé jusqu’au lac du Lauvitel pour réceptionner un héliportage en partie destiné à sécuriser un sentier. Dans son dos, au loin, la station de l’Alpe-d’Huez et son glacier de Sarenne, en voie de disparition. Face à lui, un grand lac puis une combe aux teintes blanches et orangées, mi-neige mi-sable du Sahara. Venus par le sentier empierré depuis le village en contrebas ou de plus loin par le sentier de grande randonnée GR 54, qui contourne les massifs de l’Oisans et des Écrins, des randonneurs profitent des derniers instants de leur bivouac, toléré jusqu’à 9 heures. Le Lauvitel est le site le plus fréquenté de l’Oisans et de tout l’ouest des Écrins. Pourtant, le fond du vallon a quelque chose d’un secret bien gardé pour la plupart de ses visiteurs.

Au cours du mois de juin, la neige accumulée cet hiver (qui conserve les traces des différents épisodes sahariens) va faire monter le niveau du lac du Lauvitel. © Didier Flury/Reporterre

Depuis 1995, 700 hectares limités par deux arêtes, un torrent et le lac forment une réserve intégrale. L’accès y est interdit : aucune activité forestière, pastorale, cynégétique ou touristique. Les rares à pouvoir y pénétrer après 1 kilomètre à la rame sont scientifiques. « L’idée : regarder comment évoluent les milieux sans intervention humaine », explique Jérôme Forêt.

« La forêt est touffue, on a du mal à passer. »

De loin, impossible de repérer une différence. De près, les chercheurs chanceux observent une végétation plus sauvage, beaucoup de bois mort, d’insectes. « C’est un peu mythique, décrivent les grenoblois Wilfried Thuillier et Amélie Saillard, du Laboratoire d’écologie alpine. Le plus marquant, c’est la forêt. Elle est touffue, on a du mal à passer, il n’y a pas de chemin. » L’été, les prairies sont très hautes. Des bornes de géomètres sont plantées pour…

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Auteur: Bruno Poussard Reporterre