« Dans les musées, les œuvres sont instrumentalisées par l'industrie fossile »

De la soupe sur une toile de Van Gogh en Angleterre, de la purée sur un tableau de Monet en Allemagne, de la peinture sur une statue de Charles Ray en France… En 2022, les activistes ont multiplié les actions dans l’enceinte de grands musées. L’objectif ? Alerter sur l’urgence climatique, et notamment sur l’énorme pollution engendrée par des multinationales climaticides.

De quoi rappeler en creux une autre problématique : le fait qu’en France comme ailleurs, nombre de musées nationaux sont en partie financés via le mécénat de grandes entreprises. La fondation TotalÉnergies est ainsi particulièrement active en la matière. Le plus gros pollueur de notre pays a en effet des partenariats avec le Louvre, le Quai Branly, le Muséum national d’histoire naturelle… On peut également citer le mécénat de plusieurs groupes bancaires extrêmement polluants (la fondation BNP Paribas, « mécène fidèle et reconnu des musées », la fondation Crédit agricole pays de France…). Pour le cofondateur de l’Observatoire des multinationales Olivier Petitjean, ces dons financiers aux musées — par ailleurs largement défiscalisés… — permettent à ces compagnies de « renforcer leur emprise sur notre société, notre économie, nos gouvernants ».


Reporterre — Le financement des musées nationaux en France par des multinationales climaticides est-il une affaire récente ?

Olivier Petitjean — Les liens entre élites économiques et le monde culturel en France ne datent pas d’hier. Cela dit, depuis 2003, nous avons tout de même une spécificité très forte dans notre pays. Cette année-là a été adoptée la loi Aillagon sur le mécénat, qui permet à une entreprise mécène de bénéficier d’une réduction d’impôts sur les sociétés à hauteur de 60 % du don.

Depuis 20 ans, du fait de ce régime fiscal extrêmement avantageux, on observe une augmentation continue du mécénat d’entreprise, notamment à destination du monde de la culture. Mais au-delà de ces facilités fiscales, l’enjeu de la réputation est de plus en plus important pour ces compagnies. En devenant mécènes, des multinationales très controversées, notamment pour leur impact climatique, entendent soigner leur image. C’est le cas par exemple de TotalÉnergies, ou encore de BNP Paribas.

Quelles rétributions symboliques ces entreprises tirent-elles du mécénat ?

Ce type de mécénat relève de ce que l’on appelle le philantrocapitalisme : ces financements sont intégrés au modèle de ces entreprises en tant que dépenses nécessaires et utiles pour légitimer leur image et faciliter leurs affaires. Devenir mécènes d’un grand musée leur permet en effet de soigner leur image vis-à-vis du public. De même…

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Auteur: Amélie Quentel Reporterre