Dans les quartiers pauvres du Cap, des jardins partagés pour manger bio

Le Cap (Afrique du Sud), reportage

Dans les rues du township sudafricain, l’ancienne infirmière avance doucement, un peu ralentie par le poids des années. Un grand châle en laine gris descend de ses épaules jusqu’à sa taille, et, comme dans un relais de tissu flottant, un long manteau sombre vient s’arrêter sous ses genoux. Angelina Masungwini, 78 ans, veut rester active ; venir au centre de l’association Abalimi Bezekhaya, dans le township de Nyanga, au Cap, fait partie de ses activités hebdomadaires. Elle a toujours besoin de quelques tomates ou d’un peu d’engrais pour son potager. Et dans ce jardin hétéroclite, entre des carottes et du chou rouge, elle trouve toujours son bonheur, et des oreilles bienveillantes.

Le centre sert tout à la fois de jardin de démonstration, de lieu d’approvisionnement et de centre de formation. Abalimi Bezekhaya en a créé deux, dans les plus grands townships du Cap, Nyanga et Khayelitsha. Le but : promouvoir l’agriculture urbaine comme vecteur de justice sociale. Et pour son 40ᵉ anniversaire, l’association affiche plus de 3 000 micromaraîchers et 50 jardins partagés aidés chaque année. Une belle réussite pour une activité qui était quasiment interdite sous l’apartheid.

Le township de Nyanga, en périphérie du Cap. © Jéromine Derigny / Reporterre

Lorsque l’association a commencé ses activités en 1982, Nelson Mandela était toujours en prison. Parmi les nombreuses interdictions qui pesaient sur les Noirs figurait celle de créer des jardins partagés. Impossible de développer des « community gardens » dans les townships. Pas de vergers, pas de maraîchage possible dans les larges étendues sablonneuses des Cape Flats, là où se construisaient les ghettos défavorisés du Cap. L’apartheid, officialisé en 1948 n’a été aboli qu’en 1991.

« L’apartheid a détruit la culture agricole des populations »

« L’apartheid a détruit la culture agricole des populations surtout pour les mines d’or », dit Rob Small, pilier d’Abalimi Bezekhaya. « Même dans les zones rurales, les hommes devaient abandonner les fermes pour aller à la mine. Tout le monde devait avoir un job, les pires postes étant pour les Noirs. L’agriculture familiale était mal vue alors que quelques très grandes fermes blanches fournissaient toute la communauté. » Résultat : dans les townships, la tôle envahit le sable, les plantes n’ont pas leur place. « La nourriture était ce dont les gens avaient le plus besoin », se rappelle Rob Small.

Angelina…

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Auteur: Cécile Bontron Reporterre