Ammam (Jordanie), correspondance
Des mètres cubes d’eau contre des kilowattheures d’énergie renouvelable : voilà le marché conclu par deux ennemis historiques, Israël et la Jordanie. Les deux pays ont scellé leur engagement le 20 novembre dernier : le premier fournira deux cents millions de mètres cubes d’eau dessalée, le second donnera l’énergie produite par une ferme solaire d’une capacité de six cents mégawatts, soit environ un térawatt-heure par an. L’échange doit démarrer d’ici cinq ans avec l’appui des Émirats arabes unis, qui financeront le projet solaire jordanien. Négociée sous les auspices de John Kerry, envoyé spécial des États-Unis pour le climat, cette coopération est présentée comme une réponse aux défis environnementaux de la région : assurer la transition énergétique du côté israélien, et répondre à la pénurie d’eau douce en Jordanie.
Les deux voisins, qui étaient en guerre depuis la naissance d’Israël en 1948, ont conclu en 1994 une paix « froide » caractérisée par des relations politiques houleuses. Certains espèrent aujourd’hui que la menace de plus en plus pressante du changement climatique (conjuguée aux pressions américaines) les poussera à travailler ensemble, ce qui pourrait contribuer à relancer le processus de paix israélo-palestinien.
Mais ce projet de « paix verte » est entaché par la mise à l’écart complète des Palestiniens, qui n’en bénéficieront pas. Sa mise en œuvre nécessitera aussi de vaincre de fortes résistances en Jordanie, où les descendants des réfugiés palestiniens — qui constituent la majorité de la population — restent lésés par le conflit.
Un pays à sec
Les ressources d’eau douce jordaniennes ont plongé à des niveaux « sans précédent » qui « menacent la qualité de vie des générations présentes et futures », a alerté le Premier ministre, Bisher Khasawneh, en décembre devant le parlement.
La population jordanienne est passée de 5 à 11 millions entre 2000 et 2021, alimentée par l’afflux de millions de réfugiés venus de toute la région. Le pays possède moins de 100 m³ d’eau renouvelable par habitant et par an, dix fois moins que le seuil de 1 000 m³ qui définit selon l’Organisation mondiale de la santé la catégorie de stress hydrique la plus critique. À titre de comparaison, la France dispose de 2 000 à 5 000 m³ par habitant et par an. Déjà, le réseau municipal n’approvisionne les foyers que huit heures par semaine en moyenne, ce qui oblige les habitants à…
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Auteur: Reporterre