De l'intérêt de lire et regarder les oeuvres d'art au lieu de les brûler : l'exemple d'Alexandre Nevski — Rosa LLORENS

Le Kulturkampf ukrainien contre la Russie (un nain qui veut effacer un géant) ferait rire s’il n’y avait pas derrière une vraie guerre et de vrais morts ; mais, bien sûr, empêcher les Ukrainiens d’accéder à leur culture (l’histoire de l’Ukraine a été celle de la Russie jusqu’à ces trente dernières années) les livre sans défense au narratif du pouvoir ukronazi.

Un film comme Alexandre Nevski, de Sergueï Eisenstein, apporte un éclairage précieux sur la situation actuelle. Il n’est pas question d’en faire un commentaire esthétique, c’est un sommet de l’histoire du cinéma, et il faudrait pour cela une étude à part, mais de suivre l’action pour rafraîchir nos connaissances historico-géographiques ; on se rend compte ainsi que son sujet, la bataille du Lac Peïpous de 1242, est éminemment actuel, de même que la bataille du Champ des Merles, dans la région serbe du Kosovo, en 1389, avait, en 1999, retrouvé toute son actualité.

Un prologue situe le film dans un contexte stratégique qui présente bien des analogies avec celui d’aujourd’hui : en 1242, la Russie est prise en sandwich entre la Suède et les Allemands à l’Ouest, les Mongols (ou les Chinois) à l’Est.

Dans les premières images, les paysans russes sont dominés par la silhouette d’un drakkar ; mais ils sont occupés à le démanteler à coups de hache, car les « féroces guerriers » suédois viennent d’être battus, sur la Néva, par Alexandre Iaroslavitch, qui y a gagné son surnom de Nevski. Quant aux Mongols, après des combats sanglants, si on les voit se retirer de la seigneurie de Péréslav, où règne Alexandre, toute la région leur doit allégeance et tribut. Mais, à la différence de la situation de 1242 (qui se prolongera jusqu’au XVIe siècle), la Chine, aujourd’hui, n’est pas un pays ennemi, au contraire, elle protège le flanc Sud de la Russie ; et, déjà dans le film, on comprend qu’il y a des relations d’estime entre Russes et Mongols. Et Alexandre juge que l’heure n’est pas au règlement de comptes avec le voisin de l’Est.

En effet, un nouvel ennemi, bien plus méchant et dangereux, menace les terres russes, les chevaliers Teutoniques, associés aux Porte-Glaive livoniens (aujourd’hui lettons). Les Teutoniques, créés en Palestine par les futures villes hanséatiques, ont recentré leurs activités en Europe : ils sont appelés à la fois par la Pologne (ils vont constituer une Marche face aux Prussiens païens)et par la Papauté et le Saint Empire romain germanique. Sous couleur d’une…

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Auteur: Rosa LLORENS Le grand soir