De Truss à Sunak, un Royaume-Uni à la dérive

Thierry Labica propose dans cet article une prise de recul sur l’épisode de crise survenu au sommet du pouvoir au cours des deux derniers mois au Royaume-Uni. Au-delà du ridicule dont a souvent été accablée Lizz Truss, et du sérieux prêté au nouveau premier ministre, Rishi Sunak, l’analyse revient sur les continuités politiques du pouvoir conservateur, sur fond de crises profondes, de polarisation sociale toujours plus grande et de normalisation de reculs démocratiques toujours plus nets. Sont ensuite abordées les possibilités ouvertes tant du côté du mouvement syndical et social que du côté des indépendantismes, avant de conclure sur les effets de la situation post-Brexit.

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La violence et la rapidité du naufrage de la très éphémère première ministre du Royaume-Uni, Liz Truss, n’aura pas manqué d’un pittoresque qu’aura en outre accru le contraste avec l’ordre solennel des funérailles royales intervenues au cours des premiers jours de son mandat. L’arrivée de son successeur, Rishi Sunak, en poste depuis le 25 octobre, a été « saluée » par « les marchés ». Rebond de la livre sterling face au dollar, repli du rendement des obligations d’Etat et détente des taux d’intérêt de la dette, optimisme bien compris des analystes financiers:  « les marchés font confiance à ses stratégies fiscales » selon un expert de la Toronto-Dominion Bank; pour le directeur de Medley Global Advisors, Sunak incarne « la stabilité aux yeux des marchés parce qu’il engagera une nouvelle phase d’austérité et assurera un budget plus équilibré et une plus grande discipline fiscale »; chez BlackRock, leader mondial de la gestion d’actifs, on estimait d’emblée que dans une certaine mesure,  « les perceptions de la crédibilité fiscale [du nouveau gouvernement du Royaume-Uni] s’étaient améliorées ».[1]

Le tour funeste pris au cours des semaines qui précédèrent serait intégralement à porter au compte de l’effroyable tandem Liz Truss – Kwasi Kwarteng, et on en déduirait volontiers que leurs 44 jours au pouvoir n’auraient alors été qu’une parenthèse lamentable avant la désignation du bon Sunak et le fragile mais vaillant retour de la raison et de la  « discipline » au service de la  « stabilité ». La poussière soulevée par la panique de divers milieux capitalistes, et le vaste commentariat si soucieux d’en faire partager les états d’âme, risqueraient toutefois de faire perdre de vue un élément central de la conjoncture : si le court séjour de Liz…

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Auteur: redaction