Le président Emmanuel Macron a récemment affirmé sa volonté d’investir plusieurs milliards d’euros dans la décarbonation de l’aviation. Plusieurs voix se sont fait entendre pour souligner le caractère risqué, voire illusoire, de cette ambition et rappeler l’urgence d’une réduction du trafic aérien.
Quelques semaines auparavant, l’ingénieur Jean-Marc Jancovici proposait de limiter à quatre le nombre de vols au cours d’une vie, suscitant un débat agité sur la réduction de l’usage de l’avion par les individus.
Ces polémiques éludent toutefois une dimension centrale du problème : prendre l’avion est un privilège qui entretient notamment les rapports de domination entre les pays et en leur sein.
L’avion, un privilège du Nord global
Le discours d’Emmanuel Macron, la proposition de Jean-Marc Jancovici et la plupart des réactions qu’elles suscitent reposent sur un présupposé : l’avion est un moyen de transport incontournable, le problème est qu’il soit polluant. Or, entre 80 et 90 % des humains n’ont jamais pris l’avion de leur vie. Au cours de l’année 2018, seuls 4 % de la population mondiale a effectué un vol international.
Cette minorité à qui il arrive de voyager en avion n’est pas également répartie sur la planète : elle vit dans les pays riches. Ainsi, environ 40 % des habitants des pays les plus aisés ont pris l’avion au moins une fois dans l’année, contre moins de 1 % des habitants des pays les plus pauvres. Les avions partant d’Europe parcourent en moyenne 9 000 km par passager, contre 300 km pour les avions partant d’Afrique. La plupart des lignes aériennes relient entre eux des pays du Nord global. Elles servent à faire circuler les individus entre ces pays, pour leurs loisirs mais aussi pour alimenter le commerce et les échanges économiques.
L’avion est donc un mode de transport qui soutient une domination économique et politique des pays du Nord et…
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Auteur: Yoann Demoli, Maître de conférences en sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay