Le pic pétrolier, moment durant lequel la production de pétrole plafonne avant de décroître jusqu’à l’épuisement des réserves, est de retour. Si le boum du pétrole de schiste aux États-Unis a retardé la prise de conscience, les effets sur l’économie risquent d’être sévères, analysent Matthieu Auzanneau, directeur du Shift Project, et Hortense Chauvin, journaliste à Reporterre, dans l’ouvrage solidement documenté Pétrole, le déclin est proche, aux éditions Le Seuil-Reporterre. En voici les bonnes feuilles.
Les projections actuellement les plus optimistes, par exemple celle de Rystad Energy, identifient un pic inévitable, faute de réserves suffisantes, au plus tard au cours de la décennie 2030. Et ce dans l’hypothèse d’une configuration optimale pour les pétroliers, inconnue depuis 2014 : celle d’un prix du baril à la fois croissant et peu volatil.
2030, et même 2040, c’est tout près, compte tenu de l’inertie des organes techniques vitaux de la société. Mais le moment fatidique du pic pétrolier, probable ligne de partage des eaux de l’histoire de la société thermo-industrielle, pourrait se révéler encore plus proche de nous.
À mesure qu’une part croissante de la production mondiale devient « mature » et de plus en plus sénescente, l’équilibre est toujours plus difficile à trouver au fil du temps entre déclin de la production existante et développement de sources nouvelles. Cet équilibre est rendu plus précaire encore par la crise du Covid, qui a fait entrer en hibernation une grande part des investissements de l’industrie pétrolière mondiale.
Ce n’est pas fondamentalement un problème de prix. À la veille de cette récession économique brutale, et depuis la chute des cours du brut à partir de 2014 (qui succédait aux sommets à plus de 100 dollars du début de la décennie), la pression exercée par les producteurs de brut sur leurs fournisseurs leur permettait de comprimer leurs coûts d’extraction, au point de rendre rentable à peu près toutes les sources de carburants liquides, en dehors des sables bitumineux, même à 60 ou 50 dollars le baril. C’est bien un manque chronique de découverte de nouveaux champs pétroliers, et non la rentabilité de leur mise en production, qui expliquait en premier lieu le déficit de nouveaux projets de production, que soulignait en 2018 l’AIE dans son rapport annuel. Le « risque de resserrement de l’offre », alors pointé par l’AIE, a été considérablement aggravé par la récession entraînée par la pandémie….
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Auteur: Reporterre