Dehors les artistes !

« Mort d’un commis voyageur », d’Arthur Miller, au Teatro Nacional Dona Maria, Lisbonne.

© Jorge Gonçalves

Extrait d’un article initialement paru dans l’édition portugaise du Monde diplomatique. Notre mensuel fédère un réseau de 34 éditions partenaires qui publient, chaque mois, tout ou partie de ses numéros en 24 langues.

Le Teatro da Politécnica-Teatro Paulo Claro, à Lisbonne, où ils travaillaient, va cesser d’exister. Les Artistas Unidos sont contraints de faire leurs valises et de chercher où continuer. Pour répéter, jouer, accueillir d’autres compagnies, monter des expositions, promouvoir lectures et présentations de livres, accueillir des étudiants-stagiaires. Disposer d’un lieu, stabiliser une compagnie et renforcer l’activité des artistes, ce fut pourtant la préoccupation constante de Silva Melo, un moyen de lutter contre la précarité, contre l’épuisement du théâtre dit indépendant, et de libérer l’acteur du pouvoir du metteur en scène, afin de « faire des contemporains. Inventer des contemporains ».

Durant près de cinquante ans, Jorge Silva Melo s’est fait reconnaître au théâtre, au cinéma, dans l’écriture, mais aussi par ses interventions dans la vie culturelle, sociale et politique. Il connaissait le pouvoir des mots, et savait s’en servir pour provoquer des réactions et chercher à entraîner des changements, il savait comment rendre visibles les difficultés toujours plus grandes qu’il rencontrait pour réaliser le théâtre qu’il défendait. Sa voix se faisait entendre dans les spectacles, mais aussi dans la presse, et aussi sur Facebook — où il regrettait l’absence de place pour la critique et la réflexion dans les médias traditionnels.

Sa contribution a été décisive. D’abord avec la fondation du Teatro da Cornucópia, avec Luís Miguel Cintra, en 1973, puis avec la création des Artistas Unidos en 1995, une décennie s’est ouverte où de jeunes artistes osèrent montrer de quoi ils étaient capables, expérimentant avec lui « comment faire ». Mais avoir un groupe d’acteurs pouvant travailler avec des contrats pérennes, dans divers spectacles, est devenu de moins en moins possible.

La pertinence et l’intelligence de ses créations ont pourtant été reconnues nationalement et internationalement. Interprète, metteur en scène, il a rassemblé un collectif, suggéré des travaux, créé ce qui manquait : une revue, une collection de pièces de théâtre, dont il a traduit une bonne part, des lectures de…

La suite est à lire sur: blog.mondediplo.net
Auteur: Maria João Brilhante