Démouchecrassie

Comme à chaque élection présidentielle, mais peut-être encore davantage pour celle-ci, la question du vote refait surface. Ne pourrait-il pas s’avérer « utile » ou de moindre mal ? Les plus radicalisés vont jusqu’à parler d’acte politique voire d’un devoir. L’auteure de ce texte, y voit l’expression d’une « démouchecrassie ».

Depuis 240 millions d’années, sur Terre, la merde attire la mouche. Excréments, saletés, détritus, macchabés… L’offre est abondante et même plutôt diversifiée. Munie de sa paire d’ailes, la mouche hésite, passe d’une merde à l’autre. La couleur, la texture, l’odeur, l’éclat… A chacune son petit plaisir. Ainsi, elle tâte ou tatillonne. Et finalement se pose sur une merde plutôt qu’une autre. Depuis 240 millions d’années, il en est ainsi, la mouche finit toujours par trouver une merde pour promontoire et bombance.

Depuis presque 240 années, on vote. Conservateurs, réformistes, populistes, communistes, socialistes, libéraux… Munis de notre carte d’électeur, on erre d’un débat à l’autre. Immigration, chômage, sécurité, environnement… A chacun son petit marché. On doute ou barguigne. Et finalement on dépose un bulletin plutôt qu’un autre. Depuis presque 240 années, on finit toujours par trouver un élu pour gouvernant.

La mouche ne souffre d’aucune exception dans son choix de la merde. Chez les hommes, c’est une autre affaire. Quelques-uns préfèrent l’abstention. La souveraineté ne leur sied guère, disent les uns. La citoyenneté ne les apprête que trop, renchérissent les autres. Ils verront bien quand ils ne pourront plus !, concluent les derniers.

Seulement, avons-nous déjà pu ?

La société démouchecrassique, organisée autour du droit de vote nous berne deux fois.

Le premier mensonge sent le manager à plein nez. On se rend aux urnes comme à un rendez-vous de carrière. Sommés de réfléchir en un moment, en un lieu et en une case, nous consentons à une parole par intermittence. Surtout, électeurs impatients, nous attendons passivement le moment où il sera fait appel à notre bon sens et à notre moralité pour choisir le parfait candidat-programme. Nous allons bientôt les remercier de nous retirer la peine de penser.

Le deuxième mensonge nous fait croire que du nombre vient l’unité. A défaut de pouvoir le faire parler, le droit de vote a mis le peuple en équation. Dites-moi combien d’individus, je vous dirai combien de représentants. Dites-moi combien d’espèces de mécontents, je vous dirai combien de programmes. La mesure pour principe. Sauf que le Peuple…

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Auteur: lundimatin