Dénoncer la corruption en Afrique : « Un acte radical de résistance avec un impact impressionnant sur les sociétés »

« La première chose que j’ai faite quand j’ai vu que quelque chose n’allait pas, c’était d’aller voir ma hiérarchie. Mais malheureusement, sa réaction a été de me menacer. » En 2016, Jean-Jacques Lumumba était à peine trentenaire et cadre dirigeant du département crédit au sein de la branche congolaise de la banque BGFI (ex-Paribas Gabon, renommée Banque gabonaise et française internationale). Il vient de découvrir l’existence de plusieurs transactions suspectes, à hauteur de dizaines de millions de dollars, entre la banque, dirigée par des proches de la famille de Joseph Kabila, alors encore au pouvoir en République démocratique du Congo (RDC), et des sociétés également contrôlées par des proches du président.

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« Moi-même, à ce moment-là, je n’imaginais pas l’ampleur du scandale et la profondeur de ce qui se jouait, mais c’était déjà des choses que je ne pouvais pas couvrir en tant que responsable de risque de crédit », témoigne Jean-Jacques, petit-neveu du héros de l’indépendance congolaise Patrice Lumumba. Il bénéficie alors d’une position professionnelle confortable, mais décide malgré tout de lancer l’alerte. « Un banquier n’est pas payé pour couvrir des irrégularités. On est là au contraire pour faire en sorte que le secteur bancaire soit le plus sain possible. »

Le jeune cadre se retrouve menacé de mort et doit quitter son pays. Il se réfugie en Europe, démissionne de son poste et révèle le scandale à la presse. Le journal belge Le Soir publie en octobre 2016 un article au sujet des activités suspectes de la BGFI, basé sur les documents révélés par l’ancien banquier. « Quand les enquêtes de la presse ont commencé, Kinshasa s’est mis en ordre de bataille pour traquer toute personne qui m’était proche », relate-t-il.

« Quand on dénonce des faits de corruption, on est considéré comme le criminel à abattre »

Sa famille doit alors être exfiltrée de RDC. « Cela fait six ans que ma sœur, mon frère et ma tante sont en exil en Europe », rapporte Jean-Jaques Lumuba lui-même réfugié à l’étranger. « Au Congo et dans d’autres pays africains, quand on dénonce des faits de corruption, on est considéré comme le criminel à abattre. C’est fou, mais c’est la vérité. »

Malgré tout, d’autres Congolais…

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Auteur: Rachel Knaebel