Départ

« Assez connu. Les arrêts de la vie. – Ô Rumeurs et Visions !

Départ dans l’affection et le bruit neufs ! »

Illuminations, Rimbaud

Ton ciel est carrelé

tu ne vois plus le soleil

mais sur l’une des dalles est peint un soleil

alors tu regardes ce soleil peint en te disant que tout va bien

into the civilized

ton regard rencontre des vitres des grilles des grillages des barreaux

ta vision passe à travers ton corps s’y heurte

un chemin tracé de barbelés

du temps gagné dans les escalators

des pubs pour canaliser l’attention

des pubs toujours pour les millions

*

Pour que tu ne passes pas ton temps à regarder les nuages

sur les pelouses des jardins : des mines

tu es devenu ce qu’on t’a imposé d’être

et le soir quand tu es seul

tu te frappes le crâne

tu voulais plaire

être aimé

depuis tu aimerais simplement être oublié

tu serais prêt à t’arracher les dents pour enlever ton appareil dentaire

à te jeter d’un pont pour ne plus être évalué

pour ne pas les laisser te dire si tu es assez compétent

assez formé

assez normé pour répondre aux attentes

tu voudrais mettre ta tête sous les pattes du Sphinx de Gizeh

eux te disent que tu es trop censé pour te retirer de la Cité

pour aller vivre ou mourir en Alaska comme Alex Supertramp

toi tu observes le vent se lever plier arbres et poteaux de signalisation

pensant au fait qu’il y avait des mégalodons il y a un peu plus d’un million d’années trois fois plus gros que les plus gros des requins blancs

*

Quand on a passé une journée de marteau-piqueur

que les transports nous compressent nous salissent

lorsqu’il pleut et que chacun ressemble à un rat mouillé

s’agitant

disant la même boue que celle servie dans les journaux gratuits

lorsque la parole sert de réservoir à la fange

que regarder l’autre devient un prétexte à la guerre

envie irrésistible

en tournant la clé de son chez soi censé nous contenir dans un 9m²

de mettre sa tenue de cosmonaute

et de partir sur Mars

les veines remplies de nitroglycérine

il suffirait de frictionner l’allumette

pour soudain sentir le cœur fusée rencontrer la vitesse et crier et jouir jusqu’à en pleurer

dépasser tout

mordre le vent

décharger toutes ces molécules : noradrénaline endorphine sérotonine

et boire ce cocktail multi-vitaminé jusqu’à danser danser dans les ruelles en courant à pleine balle plus rapide qu’un avion de chasse

foutre une patate à la rue

se battre avec soi-même

se battre avec le vide

*

Fatigués de devoir nous taire

de ne pas connaître le nom…

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Auteur: dev